Je réponds tardivement à ce fil passionnant. J'ai découvert Max et compagnie à 15 ans, à sa première diffusion, et pour cela, cette VF occupe une place particulière dans mon cœur : maaais, c'est très bien qu'elle y reste et je n'ai pas du tout envie de la revoir! (En vrai, j'ai déjà revu des bouts d'épisode VF juste pour le fun...).
Bien sûr, je suis attaché aux voix d'origine : Dorothée Jemma, Eric Etcheverry, et aussi Marie-Laure Dougnac, la voix de Manu/Manami, que j'aimais beaucoup.
Est-ce que j'aurais apprécié autant si j'avais découvert KOR en VO? Difficile à dire : à cette époque, regarder de la VO, même pour des films américains, me semblait être un truc d'extra-terrestre, alors du japonais! Mais bon, je n'oublie pas que c'est à cette époque que j'ai vu mon premier film japonais en VO, Akira, et que cela avait été une claque phénoménale : alors peut-être que KOR m'aurait marqué encore plus si cela avait la première œuvre que je découvrais en japonais.
Ce qui est sûr, c'est que le côté plus "obsédé" des personnages masculins et l'abondance d'allusions ou de situations coquines dans la VO m'aurait certainement un peu choqué à 15 ans : j'étais un grand romantique plutôt prude et cela m'aurait probablement un peu mis mal à l'aise. Surtout cette atmosphère romantique rose bonbon (et reconnaissons-le, un peu mièvre) de la VF est ce qui me "parlait" le plus et m'ont attiré vers cette série : les transports de l'âme me touchaient plus que les situations salaces.
Cela a d'ailleurs été une de mes principales réalisations quand j'ai découvert la VO 15 ans après : "En vrai, Kyosuke, il pense quand même beaucoup plus au cul que Max!", et sur le coup, je me rappelle que cela avait un peu cassé mon identification au personnage. Mais après, j'ai aussi découvert de multiples scènes censurées hilarantes (la scène dans la salle de bain dans l'épisode aux sports d'hiver!) dont je ne pourrais absolument plus me passer.
Je suis aussi sûr que si je revoyais la VF, je verrais disparaître d'innombrables liens et explications dont je me suis régalé dans mes multiples analyses de l’œuvre. Celle qui me vient la plus naturellement en tête est l'aveu de Madoka sur l'île déserte concernant la scène sur le banc plusieurs épisodes plus tôt : totalement effacée en VF! On ne sait pas du tout de quoi elle s'excuse ou elle est gênée.
Cela rejoint aussi un débat un peu plus général sur les VF de l'époque, en particulier celles du Club Do. Dorothée et l'équipe d'AB Prod avaient été critiqués à l'époque pour la diffusion de dessins animés crétins, violents et à contenu sexuel, qu'ils censuraient pourtant abondamment pour être moins attaquables. D'anciens spectateurs ont pris leur défense a posteriori : Dorothée elle-même a toujours avancé qu'elle avait été la principale actrice de l'introduction du manga/anime en France, dont on ne peut discuter l'indéniable domination aujourd'hui. Sans ces diffusions du Club Do ou de la Cinq, il n'est pas du tout certain que nous aurions eu une diffusion aussi large en France des produits culturels japonais.
Mais à côté de cela, d'autres personnes critiquent vertement le massacre des œuvres originales et le manque de respect pour leurs créateurs, dans le but purement mercantile de remplir une grille de programmation jeunesse (Jean-Luc Azoulay et Berlusconi étaient avant tout des hommes d'affaires). En France, "dessin animé = enfant", et s'il fallait tronçonner et dénaturer une œuvre originale pour la montrer à des 8-10 ans parce qu'on n'avait rien d'autre et que la production française coûtait trop cher, so be it!
J'aimerais conclure sur le sujet mais ce faisant, je résoudrais la question la plus fondamentale de la philosophie morale, qui oppose depuis 2500 ans les conséquentialistes ("Seul compte le résultat.") aux partisans de l'éthique de la vertu ("Seule compte l'intention."). J'ai bien sûr résolu ce dilemme il y a longtemps mais c'est pas drôle si je vous donne la soluce tout de suite.
- GzJulien aime ceci