« La Première Marche »
par CyberFred
Épisode 36
La Première Marche
Précédemment, dans « Kimagure Orange Road – La Première Marche »…
Manami se retrouve dans un lieu étrange où se produit une rencontre inattendue. Comment va-t-elle réagir ?…
Manami n’avait jamais vu pareille créature. À première vue, elle crut distinguer un chat dressé sur ses pattes arrière, mais en s’approchant, elle remarqua des détails à la fois étranges et fascinants. L’être étrange, de la taille d’un grand chat domestique, arborait un pelage orange intense. Vêtu d’une chemise hawaïenne verte parsemée de motifs floraux rappelant les écailles d’une tortue, il portait également un petit bermuda bleu. Ses pattes arrière étaient chaussées de tongs, ajoutant une touche insolite à son allure. Ce qui frappait le plus, c’était le sommet de sa tête : plat, avec une cavité remplie d’eau cristalline. Ses immenses yeux ambrés, grands ouverts, évoquaient ceux d’un chat prêt à jouer un tour. Une large bouche souriante, encadrée de longues moustaches, contrastait avec ses oreilles pointues, complétant un visage fascinant et déroutant. L’étrange créature fixait silencieusement Manami.
Le chat dans les bras de la jeune fille se tortilla légèrement, mais ne sembla nullement effrayé. Au contraire, il paraissait tout aussi intrigué. Que se passait-il dans l’esprit de Manami ?… Jamais elle n’avait rencontré un tel être.
– Que… qu’est-ce que vous êtes ? murmura-t-elle enfin, les yeux écarquillés. Suis-je en train de rêver ?…
– Non point, répondit la créature, lui adressant un petit signe de sa patte avant.
Manami sursauta. Voir un animal, vêtu comme un humain, parler et se comporter de manière si familière, avait de quoi déstabiliser. Par inadvertance, elle relâcha le chat qu’elle tenait dans ses bras. Celui-ci atterrit souplement sur ses quatre pattes, reniflant dans la direction de la mystérieuse créature. À sa grande surprise, celle-ci demeura figée, comme tétanisée, alors que le chat s’approchait doucement. Ce dernier la fixait avec un regard étrange, puis miaula. La créature laissa échapper un cri de stupeur :
– Mais ?!…
Manami observait la scène avec perplexité : un grand chat étrange, debout sur ses deux pattes arrière, effrayé par un chat ordinaire bien plus petit que lui ?… Voilà une situation des plus inattendues.
– Peux-tu… Pourrais-tu rappeler ton chat, s’il te plaît ? balbutia-t-il nerveusement.
– Un chat te fait peur ?…
– Eh bien… mes cousins éloignés viennent souvent à moi lorsqu’ils ont soif, répondit la créature, visiblement embarrassée. Ils essaient de boire l’eau que je porte sur ma tête.
– Vraiment ?… Mais qu’es-tu au juste ? demanda la jeune fille en récupérant dans ses bras son animal adoptif.
– Un kappa neko. Comme tu peux le voir, je suis à la fois chat et kappa.
Manami fronça les sourcils, perplexe.
– Un kappa neko ou un neko kappa ? risqua-t-elle.
– Un kappa neko. Mais je suis plus chat que kappa. Batman est techniquement plus humain que chauve-souris !
– Tu es un être hybride ?… Mais qu’est-ce qu’un kappa ? Il me semble avoir déjà entendu ce nom…
– Bien sûr, acquiesça la créature. Cela fait partie du folklore de ton pays, le Japon. Les kappas sont des esprits aquatiques qui portent leur pouvoir sur leur tête. (Il désigna l’eau qui remplissait la cavité au sommet de son crâne.) Comme tu le vois, c’est cette eau qui…
Il s’interrompit en voyant Manami reculer avec une méfiance soudaine.
– Attends… tu es un yōkai ? [Esprit ou démon, NDLR] s’écria-t-elle, la voix tremblante.
De concert, son chat dans ses bras émit un feulement menaçant en direction de la créature.
– Non !… Attends, Manami ! Je ne suis pas ce que tu crois !…
La créature joignit les mains en un geste de prière, cherchant à apaiser la jeune fille.
– Es-tu dangereux ? insista-t-elle, toujours sur ses gardes.
– Pas du tout ! Je suis même tout le contraire des kappas non hybrides, qui sont… disons… imprévisibles. Mais comment pourrais-je te convaincre ?… Je suis au-dessus de tout cela.
– Que veux-tu dire ?…
– Je ne suis pas dangereux. Au contraire, je sers l’humanité.
– Je ne comprends pas, fit Manami avec scepticisme. Comment un être comme toi peut-il aider les humains ?
La jeune fille jeta un coup d’œil autour d’elle, troublée par l’étrangeté du lieu. Tant de questions lui venaient en tête en même temps.
– Où sommes-nous ? demanda-t-elle soudain. Quelle est cette dimension ?
Elle reporta son regard sur la créature, les sourcils froncés. Le kappa neko, nerveux, laissa échapper quelques gouttes d’eau sur sa joue velue.
– Manami, je sais que tu possèdes le Pouvoir, dit-il calmement. Et je dois avouer que tu aurais l’avantage si tu l’utilisais contre moi.
Surprise par cette franchise, la jeune fille décelait néanmoins une sincérité troublante chez la créature.
– Est-ce toi qui m’as amenée ici ? interrogea-t-elle.
– Euh… Oui et non… Disons cela comme ça…
– Je n’y comprends rien ! Tu vas tout m’expliquer ! s’écria-t-elle, la voix montant d’un cran.
– Bien sûr ! Bien sûr !… C’est précisément pour cela que tu te trouves ici, dans mon domaine !
Les yeux de Manami s’étonnèrent :
– Ton domaine ?… Je ne vois qu’un lieu plongé dans un blanc absolu, du sol jusqu’au ciel. Si tant est qu’on puisse appeler ça un ciel…
– Tes yeux et tes sens sont incapables de percevoir un espace qui échappe à ta compréhension humaine, répondit le kappa neko avec calme. Je ne mens jamais aux humains. Je suis à leur service.
– Tu parles par énigmes ! rétorqua Manami. As-tu au moins un nom ?
– C’est plus compliqué que ça…
Manami commençait à grincer des dents.
– Encore des énigmes ! (elle tourna le dos au kappa neko cherchant une sortie) Je perds mon temps dans cette dimension ! Fais-moi rentrer chez moi !
Effrayée, la créature écarquilla les yeux. Désespérée, elle se laissa tomber à genoux, inclinant la tête jusqu’à frôler le sol, risquant de laisser s’échapper un peu de son eau précieuse, en s’écriant :
– Je t’en supplie, Manami ! Reste encore un peu ! Je m’en remets à ta bienveillance et à ta compréhension. Il est crucial que tu restes ici quelque temps.
Se retournant, la jeune fille n’en crut pas ses yeux. Cette marque de soumission absolue, presque archaïque, la stupéfia. Lentement, elle s’approcha du kappa neko.
– Ma présence est-elle vraiment si nécessaire ? murmura-t-elle d’une voix plus posée. Après tout ce que j’ai traversé, tous ces voyages interdimensionnels…
Le kappa neko releva la tête sans quitter sa position agenouillée.
– Tu dois comprendre, Manami, que beaucoup de choses dépendent de toi. De toi seule…
– Tu crois vraiment que je vais te croire ? Tu dis ça uniquement pour me retenir ici, par désespoir. Que signifie tout ça, au juste ?
Acculée, la créature n’eut d’autre choix que de répondre :
– Je dis la vérité ! Regarde-moi, je t’en supplie ! Si je penche la tête plus bas encore, toute l’eau de ma cavité crânienne pourrait s’écouler ! Si cela arrive, je tomberai dans le coma ! Je serai à ta merci !
Manami fixa la créature avec une attention nouvelle. Derrière cette apparence étrange, elle percevait soudain une fragilité presque humaine. Elle recula légèrement pour ne pas paraître menaçante.
– Je suis désolée, souffla-t-elle. Je suis à bout de forces… Et dans ce cas, je peux m’emporter facilement. (Elle soupira) Tous ces voyages… (Puis, regardant la créature) D’accord, relève-toi, je vais rester un peu, en attendant qu’une nouvelle porte interdimensionnelle s’ouvre pour moi.
Le kappa neko esquissa un sourire en se redressant.
– Merci, Manami. Je te promets de tout t’expliquer. Mais avant cela, tu dois avoir soif et peut-être un peu faim ?…
– Si tu as un verre de jus d’orange, je ne dirais pas non. Et de l’eau et de la nourriture pour mon chat.
– Aucun problème, répondit le kappa neko.
Il tourna son regard vers un point situé à droite de Manami. En un instant, du néant, surgirent une chaise et une table élégamment dressée, ornée d’une nappe blanche, de verres et de pichets de jus d’orange fraîchement pressé, accompagnée d’un plateau de biscuits délicats. Au sol, deux gamelles : une remplie d’eau et l’autre contenant des croquettes pour chat.
– Comment fais-tu ça ? murmura Manami, stupéfaite. Tu possèdes le Pouvoir ?…
– Non point, répondit doucement le kappa neko. Je suis simplement maître de ce domaine. Mais ne t’en fais pas pour cela. Mange, repose-toi un peu, et ensuite, nous parlerons tranquillement.
Manami reposa son chat au sol et le laissa aller vers les gamelles. Puis, elle se laissa tomber sur la chaise. Elle saisit l’un des pichets et se servit un verre de jus d’orange qu’elle but lentement, savourant chaque gorgée. Tout en grignotant quelques biscuits, ses pensées vagabondèrent. Elle repensa à sa famille qui devait très certainement s’inquiéter pour elle. Elle pria pour que tout se passe bien dans son monde. Elle songea aussi à Kazuya, qu’elle avait rencontré au sommet des marches du parc de Takaoka. Il avait été la seule personne à échanger avec elle au cours de ses périples. Son chat, quant à lui, s’abreuvait avec reconnaissance. La pauvre bête en avait bien besoin. Manami pria pour que son odyssée touche bientôt à sa fin. Et dire que tout cela dépendait désormais de ce kappa neko énigmatique, seul maître de cet étrange lieu immaculé.
– Pourquoi habiter dans un endroit aussi vide et sans couleur ? demanda la jeune fille, en se servant à nouveau de jus d’orange.
– Ne t’inquiète pas pour cela, répondit le kappa neko avec un large sourire. Cet espace doit d’abord rester épuré, pour que tout ce qui s’y manifestera ait une vraie raison d’être à tes yeux. Mais bientôt, tu verras : le décor se remplira.
Perplexe, Manami fronça les sourcils. Qu’est-ce que cette créature voulait dire ?… Elle finit de boire son verre, puis le déposa sur la table, ainsi qu’un demi-biscuit inachevé, avant de fixer le kappa neko.
– C’est bon, décida-t-elle. Je vais laisser mon chat terminer son repas tout seul. A présent, nous devons parler.
– Tout à fait, approuva la créature. Viens par ici, je vais te montrer des images, tout en t’expliquant.
Manami s’avança, abandonnant son chat à sa gamelle. Le kappa neko leva une patte velue, pointant un espace situé devant eux. Soudain, une petite sphère tournoyante et palpitante, d’une trentaine de centimètres de diamètre, apparut dans les airs. À l’intérieur, il y avait une infinité de petits points lumineux palpitants se mouvant comme s’ils étaient tous plongés dans un liquide invisible.
– Qu’est-ce que c’est ? demanda Manami, surprise.
– C’est une représentation simplifiée du Multivers où tu vis, répondit la créature. Regarde bien : c’est une structure vaste, composée d’univers parallèles, chacun isolé des autres, coexistant côte à côte sans jamais s’entrelacer. Comme tu as pu le comprendre, ton propre univers fait partie intégrante de cet ensemble.
– Oui, j’avais saisi cela, acquiesça Manami.
– Pour passer d’un univers à l’autre, comme tu l’as fait à de nombreuses reprises, il faut traverser un espace transitoire particulier appelé « Entre-Monde ». Tous ces univers que tu vois ici sous forme de petits points à l’intérieur de cette sphère, baignent dans cet Entre-Monde.
– Étrange, je n’ai jamais remarqué cela durant mes voyages. Comment sais-tu tout cela ?
– C’est mon rôle de tout savoir, dit le kappa neko avec un sourire énigmatique.
– Sommes-nous ici dans cet Entre-Monde ? demanda Manami.
– Non point, répondit la créature. L’Entre-Monde est bien plus chaotique et déstabilisant que cet endroit-ci. Mais laisse-moi continuer, c’est important pour la suite.
À côté de la première sphère, le kappa neko en fit apparaître une autre, semblable, mais distincte.
– Et ça ? demanda Manami.
– Un autre Multivers.
Les yeux de Manami s’écarquillèrent.
– Mais je pensais que le Multivers était tout ce qui est !
– C’est ce qu’on croit souvent. Mais l’Omnivers contient deux Multivers, expliqua-t-il. Le tien, celui où le Pouvoir existe, et cet autre, que je viens de faire apparaître, où le Pouvoir est absent.
– Mais qu’est-ce qui existe alors dans ce deuxième Multivers ?…
– Rien, répondit le kappa neko calmement. Là-bas, aucun être ne possède le Pouvoir. Pourtant, tout comme chez toi, les gens aspirent à en avoir. Dans ton Multivers, le Pouvoir circule à travers cet espace commun dans lequel baignent tous les univers : l’Entre-Monde. C’est ainsi que la stabilité de ce Multivers est assurée. Mais dans l’autre Multivers, rien de tel n’existe dans l’Entre-Monde.
– Comment cet autre Multivers peut-il alors se maintenir ? questionna la jeune fille. Les deux sphères semblent pourtant identiques, en apparence.
– Tu touches à un point essentiel, répondit le kappa neko. Et je vais bientôt y répondre. Je complète ici…
D’un nouveau geste, il pointa l’espace entre les deux grandes sphères. Une petite sphère toute blanche, d’environ trois centimètres, apparut alors à égale distance des deux grandes.
– Et cette petite sphère ? demanda Manami intriguée.
– C’est ici que nous nous trouvons, révéla le kappa neko.
– Entre les deux Multivers ?…
– Exactement. Tu es dans « l’Exostral ».
– L’Exostral ?…
– Oui, l’Exostral, répéta la créature avec gravité. C’est la seule dimension qui relie les deux Multivers. C’est un espace immatériel dépourvu de matière, et qui ne se divise pas lui-même en dimensions parallèles. Il n’y a qu’une seule et unique dimension ici.
– Pourquoi un tel système existe-t-il ? s’interrogea la jeune fille.
– L’Omnivers « visible » se compose de deux Multivers distincts. Entre eux, se trouve l’Exostral. Manami, je ne veux pas t’embrouiller sur le pourquoi du comment de tout ceci. Je me contente de te résumer l’essentiel sur la cosmogonie de l’Omnivers dans lequel tu vis.
– Et l’Au-delà ?… Où sont les esprits des défunts ?…
Le kappa neko éclata de rire.
– Ce n’est pas le sujet ici ! Je ne te parle que des mondes des vivants.
– Et toi, alors ? s’enquit Manami. Qui es-tu dans tout ça ? Pourquoi es-tu là ? Et pourquoi suis-je ici ?…
– Que de questions… mais c’est normal. Commençons par mon rôle.
– Oui, il serait temps !
– Tu me vois comme un kappa neko, mais je suis en fait l’image souhaitée par quelqu’un.
– Hein ?… Comment ça ?…
– Comme je te l’ai déjà dit, Manami : l’Exostral est intangible. Tout ce qui s’y trouve l’est aussi.
– Mais moi je suis bien tangible ! J’ai même bu et mangé à cette table qui est là-bas !
La jeune fille la désigna du doigt.
– Oui, je le sais. Pourtant, ici, tu es dans un monde spirituel. Tu es bien présente, mais tu ne réalises pas que tu es intangible.
– Quoi ?! s’écria Manami effrayée. Je suis morte ? Je suis un fantôme ?!…
– Pas du tout ! répondit le kappa neko avec un sourire. L’Exostral n’est pas un endroit où la matière, propre aux Multivers physiques, peut se maintenir. Dès que la matière entre ici, elle est transmutée en une substance intangible, ou spirituelle, si tu préfères, le temps de son passage. Ne t’inquiète pas, tu conserves bien ta mémoire, ton Pouvoir… et même ta faim, comme si tu étais encore sous forme matérielle.
– Pfff !… À quoi bon manger ou boire alors ?
– Rassure-toi, Manami, les vitamines intangibles du jus d’orange que tu as bu agissent bien sur ton corps intangible. Regarde ton chat : il mange et boit comme si de rien n’était, sans percevoir la différence entre la matière tangible et intangible. Et pourtant, les chats ont une sensibilité située bien au-delà de celle des humains. Même ici, tu ressens tout comme si tu étais encore matérielle. Moi aussi, bien que je sois intangible, si tu me touches, tu auras l’impression que je suis réel.
– D’accord, j’ai compris. Donc, si je suis immatérielle ici, je retrouverai ma forme physique en regagnant mon Multivers, n’est-ce pas ?
– Exactement, acquiesça le kappa neko.
– Continue.
– Je suis donc celui qu’il me voit et me nomme ainsi.
– Quelqu’un t’a nommé ? Tu n’as pas de nom à toi ?
– Oui et non, répondit la créature.
– Mais alors, quel est ton nom ?
– Izumi Matsumoto.
– Quoi ?… C’est ton vrai nom ?
– Non. C’est le nom qu’on m’a donné. Je n’ai pas de nom à moi.
Manami resta perplexe, ses pensées embrouillées.
– Je ne comprends plus rien ! Tu dis que tu n’as pas de nom, puis tu m’en donnes un qui ne t’appartient même pas. Je suis perdue.
– Et le plus amusant, reprit la créature en riant, c’est que la personne à qui appartient ce nom n’en fait pas non plus son vrai nom !
– Argh ! rugit Manami, serrant ses poings comme pour agripper un vide invisible.
– Patience, jeune fille. Je vais te montrer quelque chose d’important maintenant, qui te dévoilera tout.
Le kappa neko effaça la représentation des deux Multivers et de l’Exostral. À la place, une large surface semblable à un écran plat apparut, montrant la scène où Manami avait rencontré Kazuya dans le parc de Takaoka. La vue plongeait sur eux, les entourant comme si des caméras invisibles captaient chaque mouvement sans qu’ils ne s’en rendent compte.
– Mais c’est moi !? s’exclama Manami. Et cet homme… Kazuya… C’est un souvenir d’avant mon arrivée ici. Comment fais-tu cela ?
– L’Exostral est hors du temps et de l’espace, expliqua le kappa neko. Je peux observer tout ce qui se passe ou s’est passé dans les deux Multivers, passé et présent.
– Et le futur ?…
– C’est là que réside la difficulté pour des êtres comme moi.
– Comment ça ?…
– Le futur ne se dévoile pas de la même manière que le passé. Dès que je suis lié à un être humain, dans son monde, son univers et son Multivers, ma perception du temps se réduit à son propre présent. Je ne peux pas voir au-delà de cet instant.
– Tu es donc attaché à Kazuya ici, à l’image ?…
– Oui… Kazuya est un humain qui aime me représenter sous la forme d’un kappa neko, empruntant aussi le pseudonyme d’Izumi Matsumoto. Mais il ne sait pas qu’il m’imagine réellement ainsi dans l’Exostral.
– Hein ?!... s’exclama Manami.
– Je suis une sorte d’avatar, si tu veux. Tout comme un humain rêve d’endosser la peau d’un personnage idéal, je prends cette forme selon sa vision.
– Mais alors… Suis-je dans un rêve ?… Est-ce que je dors depuis le début ?…
– Non point, Manami. Je suis un esprit bien réel. Mon rôle, ici dans l’Exostral, est d’adopter le corps, le nom et l’attitude que celui qui m’imagine, me confère. En l’occurrence, Kazuya.
– Donc, tu es une sorte d’ange gardien pour lui ? tenta Manami.
– Ha ah ! L’idée est amusante, mais la réalité est bien plus simple. Je pense et j’agis comme un kappa neko parce que c’est ainsi que Kazuya me perçoit dans son imaginaire. En vérité, je suis un esprit lié à l’intuition et à l’inspiration. Ma mission est d’inspirer un humain, et en échange, il me donne forme et nom.
– Mais c’est complètement fou ! laissa échapper la jeune fille ricanant presque.
– Pas tant que ça, rétorqua le kappa neko. Sache que ton Multivers n’est pas concerné. Seul celui où vit Kazuya et tous ses semblables est affecté par mon rôle et celui de mes pairs.
Manami, surprise, s’interrompit :
– Attends… Que dis-tu ?!… Kazuya ne vit pas dans mon Multivers ?… Il est dans l’autre ?…
– Exactement !
– Mais… Comment ai-je pu voyager jusqu’à chez lui ?… C’est impossible…
– Et pourtant, tu l’as fait, révéla le kappa neko. Tu as traversé ton Multivers jusqu’à celui de Kazuya, sans passer par l’Exostral. C’est un exploit que personne de ta réalité multiverselle n’a accompli jusqu’ici, car il est normalement impossible de voyager directement entre les deux Multivers.
– Mais je n’ai pas le pouvoir de faire cela…
– Je te donnerai une explication, et bientôt tu comprendras.
Manami scruta encore l’espace autour d’elle, puis demanda :
– Tu disais ne pas être seul ici… Où sont les autres ?
– En effet, je ne suis pas seul, fit le kappa neko. Ici, dans l’Exostral, une myriade d’esprits comme moi, œuvre pour maintenir l’équilibre du Multivers de Kazuya.
Inquiète, Manami scruta les environs en tournant son regard partout :
– Mais je ne les vois pas… Où sont-ils ?…
– Tu ne peux les percevoir. Chacun de nous agit sur des plans différents de nous-mêmes, expliqua le kappa neko, presque avec détachement.
Manami vacilla légèrement :
– Attends… Tu veux dire que c’est ton esprit, et non ce lieu, qui se décline à l’infini, derrière cet avatar de kappa neko ?
– C’est exact. Les autres déclinaisons de moi-même possèdent des représentations autres, dépendant de l’imaginaire des liens qu’ils entretiennent chacun avec un humain ou un non humain. Pour ma part, seul Kazuya m’imagine en kappa neko. Mais tout ceci ne doit pas perturber nos échanges. Considère-moi ici comme unique. Les autres versions de moi-même sont ailleurs, bien que tout se passe dans l’Exostral.
– Tout devient si compliqué…
– Ne t’en fais pas, Manami. N’y réfléchis pas trop. C’est à moi seul que tu devras faire face, et à personne d’autre.
– Alors reprenons depuis le début : tu disais être lié à Kazuya d’une manière particulière ?
– En effet, jeune fille. Ma mission est de rester « connecté » à lui tout au long de sa vie humaine.
– Mais pourquoi faire cela ?
– Tu sais désormais que ton Multivers est maintenu en équilibre grâce au Pouvoir, précisa le kappa neko. Nul besoin de l’Exostral pour cela. C’est différent pour l’autre Multivers, celui de Kazuya. Des êtres comme moi sont nécessaires pour compenser là-bas l’absence du Pouvoir.
Manami, stupéfaite, ouvrit de grands yeux.
– Comment cela est-il possible ?
– Il en est ainsi depuis la naissance de l’Omnivers, il y a des éons. Ce n’est pas le Pouvoir qui maintient le Multivers de Kazuya, mais l’Inspiration Créative, une force invisible qui en assure l’équilibre. Moi et mes pairs la diffusons à travers toutes les strates de son Multivers, et donc son Entre-Monde.
– Alors, le Pouvoir et l’Inspiration Créative sont les deux forces qui maintiennent tout l’Omnivers physique ? murmura Manami.
– Exactement, fit le kappa neko. Et les forces fondamentales de chaque univers, comme la gravité, l’électromagnétisme, la force nucléaire forte et faible, sont aussi présentes dans les deux Multivers, ce qui explique pourquoi ils t’ont paru si semblables.
– Mais que viens-je faire dans tout cela ? demanda la jeune fille.
– Tes voyages entre les dimensions de ton Multivers ont suivi un certain « fil rouge », qui t’a finalement menée jusqu’ici.
– Ce n’est pas toi qui m’as transportée d’un monde à l’autre ?
– Non point, Manami. C’est parti du chapeau de paille rouge de Madoka.
– Quoi ? Son chapeau ?… (Elle temporisa alors sa surprise) Quoique j’en avais quelque part l’intuition… Tu connais Madoka ?…
– Bien sûr, répondit le kappa neko avec un sourire énigmatique. Mieux que tu ne le crois. N’oublie pas que je vois tout d’ici.
– Comment et pourquoi ce chapeau m’a-t-il fait voyager ? demanda la jeune fille. Je n’ai jamais voulu ça…
– Ce n’est plus un simple chapeau, répondit le kappa neko. Il a accumulé au fil des ans une énergie immense, mêlant Pouvoir et émotions humaines.
– Des émotions humaines ?…
– Exactement. Cet objet est entré en résonance avec toi lorsque Madoka est revenue des États-Unis. Tu n’imagines pas à quel point elle l’avait inconsciemment infusé d’émotions puissantes. Ses sentiments révélés se sont mêlés au Pouvoir déjà contenu dans cet objet. Et bien avant cela, Hikaru l’avait aussi tenu entre ses mains. Souviens-toi, Manami : elle était profondément bouleversée après avoir découvert la vérité sur la relation entre ton frère Kyosuke et Madoka. Elle l’a également porté à l’aéroport de Narita, le saturant encore d’émotions. [Tome 18, NDLR].
Manami se remémora ces moments intenses, lorsque Hikaru avait porté ce chapeau, avant de finalement le transmettre à Madoka, juste avant son départ pour Los Angeles. Pendant toutes ces phases d’émotions extrêmes, le chapeau en avait été le témoin silencieux.
– Mais… ni Madoka ni Hikaru n’ont le Pouvoir ! protesta Manami.
– Elles ne l’ont peut-être pas, mais cela ne les empêche pas de l’influencer à travers toutes leurs émotions, rétorqua le kappa neko. L’énergie accumulée dans ce chapeau, combinée au Pouvoir, a déclenché tes voyages interdimensionnels.
– Mes voyages ?…
– Oui, tes voyages, confirma le kappa neko. Ils sont le fruit de tout ce que le chapeau a absorbé. Mais avant de voyager, souviens-toi de tes visions étranges : Madoka, en haut des marches, perdant inlassablement son chapeau de paille rouge… Tu as vu ces scènes, n’est-ce pas ?…
– Comment le sais-tu ? C’étaient mes visions… dans mon esprit… Tu les as vues ?
– Je connais tes visions parce que j’ai vu celles de Kazuya.
– Encore des énigmes !
– Pas du tout. Tout est lié : toi, le chapeau, Kazuya et moi. Le chapeau t’a montré des visions, comme il l’a fait plus tard avec Kazuya. Tu dois comprendre que ce chapeau possède entre autre la faculté de « voir » ses propres alter-ego dans les dimensions parallèles à la tienne, à travers ton Multivers. Ainsi, en touchant le chapeau, les quelques visions que tu as eues provenaient de ces autres dimensions où Madoka n’a jamais retrouvé Kyosuke sur les marches du grand escalier. Pour diverses raisons, leur histoire a pris un tout autre chemin. Ce que tu as donc perçu, c’étaient des reflets d’univers parallèles au tien, vus à travers ce chapeau.
– Je n’arrive pas à y croire…
– Écoute bien, Manami : c’est ton propre Pouvoir, et ce chapeau désormais magique qui, aussi incroyable que cela puisse paraître, t’ont permis de voyager jusqu’à l’univers de Kazuya.
– Tu en es sûr ?
– Oui. Tu as traversé l’Omnivers pour atteindre le monde de Kazuya, le mangaka en quête d’inspiration. C’est grâce à toi qu’il a trouvé matière à créer quelque chose de grandiose. À ce stade de ton périple, c’est le chapeau de Madoka qui l’a voulu.
– Mais Kazuya cherchait seulement l’inspiration pour une nouvelle œuvre !
– Manami, tu ne comprends pas, reprit le kappa neko. Il a dépeint la vie que tu mènes avec ta famille et tes amis !
La jeune fille écarquilla les yeux, abasourdie.
– Quoi ?… Comment ?… Mais c’est impossible !
– Kazuya garde ton chapeau depuis des années. Rappelle-toi : tu l’as laissé à ses pieds, dans son monde.
Le kappa neko fit apparaître à l’écran une scène où, seul, Kazuya ramasse le chapeau de paille rouge de Madoka, avant de quitter le parc de Takaoka.
– Alors, c’est vraiment là-bas que je l’ai perdu ! s’écria Manami.
– Pas vraiment perdu, jeune fille. Le chapeau a choisi de rester avec Kazuya. Cet homme est l’un des rares à percevoir certains mondes de ton Multivers. Tu te souviens de cette première dimension où tu es allée ?… Celle où tu as rencontré Kenji Hiyama, le frère aîné de Hikaru ?…
– Oui.
– C’est un des mondes que Kazuya a perçus, fit le kappa neko. Le chapeau a ressenti cet artiste unique, et l’a choisi pour l’aider à créer une histoire plus merveilleuse encore, celle d’un autre univers que Kazuya ne pouvait pas voir : le tien !
– C’est incroyable !… Mais alors… Depuis le monde de Kenji, le chapeau a donc cherché à atteindre Kazuya à travers mon Pouvoir ?…
– Exactement, acquiesça le kappa neko. Ce n’était pas simple à réaliser, mais le chapeau voulait vraiment rejoindre Kazuya pour l’aider à entrevoir la véritable histoire qu’il devait écrire, et non ce récit de motards dont il avait perdu le fil.
– Mais le chapeau précieux de Madoka… Il est toujours entre les mains de Kazuya ! Comment vais-je pouvoir le récupérer ?
– Tu ne le peux plus, Manami, et cela ne serait pas souhaitable. Le chapeau a définitivement choisi son nouveau propriétaire. Même si tu retournais là-bas et que tu parvenais à le reprendre, il resterait avec Kazuya. Tout est déjà en marche depuis des années, car son temps à lui ne s’écoule pas comme le tien dans son Multivers. Pour toi, seulement quelques minutes se sont écoulées, mais dans son univers, plusieurs années ont déjà passé après votre rencontre. Et je te le répète : ce chapeau que tu as laissé à Kazuya a été la source d’inspiration qui l’a conduit à créer son plus grand chef-d’œuvre !
– Son chef-d’œuvre ?…
– Oui, « Kimagure Orange Road » !
– Quoi ?… Tout ça… pour ça ?…
– Manami, tu n’imagines pas encore l’impact de ce que tu as accompli dans le monde de Kazuya.
– Mais de quoi parles-tu ?
Izumi, le kappa neko, planta son regard dans celui de Manami.
– Après votre rencontre, Kazuya a compris ce que le chapeau lui a révélé sur ta vie et celle de tes proches. Il a aussi réalisé que tu venais véritablement d’un autre monde. Est-ce que tu te rends compte qu’il a rencontré en chair et en os un des personnages qu’il allait dessiner ?… Pour quelqu’un comme lui, vivant dans un univers sans Pouvoir et sans magie, c’était comme une révélation divine. Il s’est vu confier un objet aux capacités extraordinaires. En dessinant, guidé par l’inspiration du chapeau, une lumière nouvelle s’est allumée dans son monde. « Kimagure Orange Road » était la réponse à bien des questions. Manami, tu ne mesures pas encore l’impact qu’a eu cette œuvre sur la jeunesse de son univers. Ton monde, ta famille, et tes amis ont laissé une empreinte indélébile chez Kazuya, et il a su la traduire en une œuvre immense qui a touché les cœurs aux quatre coins de sa planète !
Les yeux de la jeune fille restaient écarquillés, figés dans l’étonnement.
– Ne me dis pas que je suis… que nous sommes tous… dans un livre, dans l’univers de Kazuya ?!…
– Si, exactement. Et pas un seul livre : dix-huit tomes ! Regarde…
Devant une Manami stupéfaite, le kappa neko fit alors apparaître des images nouvelles : des planches en noir et blanc, défilant sous les yeux de la jeune fille. Elle reconnut Kyosuke, Madoka, Hikaru, Kurumi, son père, Takashi, Akane, Kazuya et ses grands-parents… tous dessinés dans un manga. Elle se vit elle-même, avec ses lunettes caractéristiques. Les visages, les expressions, les dialogues… tout était si fidèlement reproduit, comme s’ils avaient été transposés depuis leur propre monde. Les scènes racontaient les épisodes marquants de leur vie, se concentrant en particulier sur ce que Kyosuke, Madoka et Hikaru avaient traversé au fil des ans. Comment était-ce possible ?… Les planches du manga retraçaient chaque instant, depuis la rencontre de Kyosuke et Madoka sur les marches du grand escalier, jusqu’à leur dernier baiser en ce même lieu, scellant une conclusion heureuse. Kazuya, ou plutôt Izumi Matsumoto, comme il se nommait en tant qu’artiste, avait créé une saga exceptionnelle basée sur les aventures d’une véritable famille dotée du Pouvoir, vivant dans un autre Multivers.
Manami observait encore les planches défiler, reconnaissant les événements qu’elle-même avait vécus il y a quelques mois ou quelques années. Yusaku Hino, Master, Kazuya Hatta, Seiji Komatsu et Sayuri Hirose… ils étaient tous là ! Même des personnages qu’elle ne connaissait pas, prenaient également vie de manière dessinée.
Devant une jeune fille silencieuse, absorbée par le défilement des planches, le kappa neko adopta alors un ton solennel :
– Manami, tu dois comprendre que « Kimagure Orange Road » a profondément marqué la jeunesse, déclara-t-il. Cette œuvre a su capturer l’essence des émotions adolescentes à travers un subtil mélange de romance, d’humour et de fantastique, dont le monde de Kazuya avait tant besoin. Ce manga a permis à de nombreux jeunes de s’identifier aux dilemmes amoureux et aux défis de la maturité, tout en les divertissant avec ses situations cocasses et ses personnages attachants. Kyosuke, avec son Pouvoir et ses relations complexes avec Madoka et Hikaru, a incarné les tourments intérieurs et les choix difficiles qui définissent l’adolescence. En explorant des thèmes tels que l’amour, l’amitié et l’identité, Kazuya a contribué à façonner tout une génération, qui a trouvé réconfort et inspiration dans ses récits. Aujourd’hui, « Kimagure Orange Road » est un classique indémodable, qui continue d’influencer profondément la culture populaire, inspirant de nombreux mangaka et créateurs à explorer les émotions humaines fondamentales. Et tout cela, Manami, c’est grâce à toi. Sans cette œuvre, le visage de ce monde aurait été bien différent. Car, avant tout, c’est une jeunesse inspirée qui bâtit l’avenir.
Manami demeurait incrédule.
– Comment est-ce possible ? s’écria-t-elle sortant de son silence. Comment un simple chapeau a-t-il pu accomplir une pareille chose ?
– Tu sais déjà que ton grand-père possède des objets magiques, fit le kappa neko. Au départ, ils n’étaient que de simples artefacts, mais grâce à son Pouvoir, il les a investis de magie pour des raisons bien précises, que je ne détaillerai pas ici. Cependant, la magie du chapeau de paille rouge de Madoka s’est éveillée d’elle-même, sans intervention de ton grand-père. Ce sont vos aventures, à toi et à tes proches, qui ont conféré à ce simple chapeau sa propre magie, en l’imprégnant des forces émotionnelles qui vous entouraient et que vous ressentiez. En quelque sorte, il est devenu un enregistreur, un témoin rare de votre univers. Quand il l’a eu entre ses mains, Kazuya, avec sa sensibilité particulière, a été réceptif à cette mémoire. Lui seul pouvait saisir l’essence de ce que ce chapeau contenait. Et heureusement, pour le bien de tous.
– Grand Ciel ! s’exclama Manami. J’avais donc raison : c’est donc bien ce chapeau qui m’a emmenée dans d’autres dimensions !
– Oui et non, corrigea le kappa neko. Au début, il te donnait juste un cap, mais c’est toi qui as vraiment le pouvoir de voyager entre les dimensions. Comme ton frère Kyosuke, mais d’une manière différente. Tout comme ta mère l’avait fait avant vous deux, en son temps.
Manami se figea.
– Tu… tu connaissais ma mère ?…
– Oui, répondit Izumi. Lorsque tu es née, elle a sauvé le Multivers où tu vis.
Le regard de Manami s’emplit de stupeur.
– Hééé ?!… Comment ça ?…
– Je vais y venir, dit le kappa neko. Mais ici, nous sommes hors du temps et de l’espace. Nous avons tout le temps devant nous.
Manami s’inquiéta.
– J’ai perdu mon chapeau, dit-elle alors. Il est désormais entre les mains de Kazuya. Est-ce que cela signifie que je peux voyager sans lui ?
– Bien sûr, fit le kappa neko. Tu n’as plus besoin de ce chapeau pour cela. Regarde : tu es ici, malgré tout. Voyager entre les dimensions est simple une fois que tu sais comment faire. Mais il te faut toujours un cap, et le chapeau te l’a donné. Moi aussi, je t’en ai donné un pour venir ici.
– Pourrais-tu me guider afin que je retourne dans mon monde d’origine ?
– Absolument.
– Et je ne vais pas me perdre dans des dimensions semblables, comme cela m’est arrivé si souvent ?
– Il est vrai que tu as eu du mal à t’orienter, répondit Izumi. Tu crées des portails, bien que tu aies l’impression que d’autres les ouvraient pour toi. En réalité, c’est toi qui les formais sans t’en rendre compte.
– Vraiment ?!…
– Et tes voyages semblaient toujours te ramener au même endroit, comme si tu refusais de t’aventurer hors des sentiers battus. Tu ne savais pas encore utiliser les caps. Tu as donc dû malgré toi apprendre à maîtriser ce nouveau don. Il est dommage que ta mère soit partie si tôt. Elle t’aurait enseigné tout cela.
Manami réfléchit à tout ce qui venait de lui être révélé jusqu’ici.
– Maintenant, je comprends bien mieux ce qui m’est arrivé, dit-elle plus calmement. Mais tu ne m’as pas tout dit.
– En effet, reconnut Izumi. Tout ceci ne t’a pas donné toutes les réponses.
– Alors, pourquoi suis-je ici ?… Si le chapeau de Madoka a accompli sa mission depuis longtemps dans le monde de Kazuya, quel est mon véritable rôle en ce lieu, dans l’Exostral ?…
Izumi Matsumoto, le kappa neko, fixa Manami avec gravité.
– Manami, un grand destin t’attend. J’ai besoin de toi pour réaliser une tâche immense.
– Laquelle ?…
– Ce que tu as accompli avec le monde de Kazuya dans son Multivers était la « Première Marche » !
– La Première Marche ?…
– Oui, dit le kappa neko avec une énergie nouvelle. Maintenant, j’ai besoin que tu m’aides à aller jusqu’au sommet !
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