Si on participe sur ce forum 30 ans après les faits, c’est que KOR raisonne en nous et les nombreux témoignages expliquant pourquoi « on n’arrive pas à oublier KOR » en sont la preuve. Donc si le débat reste vif sur « Ano hi ni kaeritai » c’est qu’il a toute sa place dans cet univers.
Effectivement, il y a beaucoup de point qui ne collent pas.
- L’absence de certains personnages
- L’absence du pouvoir
- Le doute sur la continuité avec la série dont il est censé être la fin
- La chronologie en décalage
Mais les émotions sont là. C’est fort, profond et on n’en ressort pas indemne.
En cela, ANK est une parfaite réussite, une conclusion magistrale à l’anime.
Les incohérences évoquées empêchent quoi qu’il en soit tout consensus. Il faudra faire ses choix, se faire sa propre lecture. Celle qui nous plait le plus en fonction de nos sensibilités et de notre intérêt plus ou moins prononcé sur tel ou tel protagoniste.
Mais de fait, la confusion est totale lors de mon premier visionnage. Le flou volontaire sur des points essentiels nous empêche de nous repérer. Où en est-on de la relation Madoka-Kyosuke ? On s’attend à être juste après les 48 épisodes de l’anime, mais en même temps on comprend vite que les années ont passé car ils vont rentrer à la FAC.
Personnellement, ça m’a perturbé et m’a empêché de comprendre les sentiments et l’attitude de Madoka. Sans pour autant que le film me déçoive. Mais au 2e visionnage tout m’a paru plus clair car je savais où situer l’action. Tout du moins je savais où j’avais choisi de la situer.
Voici mes choix, ma lecture :
Avant toute chose, l’absence du pouvoir. Est-ce qu’ANK essaye de proposer une version de KOR où il n’y a pas de pouvoir ? J’en doute. Car aucun des épisodes de l’anime ne tiendrait debout. Sans pouvoir : pas de KOR. Je considère uniquement qu’il n’était pas nécessaire à l’histoire d’ANK. Le pouvoir n’a d’ailleurs jamais vraiment aidé Kyosuke dans ses histoires d’amour… au contraire.
Ensuite, même s’il manque les années lycée, je décide que l’action se passe l’été qui suit la fin de la série. Au retour d’Amérique de Madoka. C’est à mon avis la raison pour laquelle les auteurs ont inséré la réplique sur l’année de naissance en 1969. Avec une pirouette (plutôt bancale je l’accorde), ils tentent de concilier l’inconciliable : un anime qui dure 1 an et un manga qui en dure 3.
Mais ce recalibrage a du sens, car si on perd en cohérence chronologique, on gagne beaucoup en symbolisme : ANK marque le passage de l’âge « orange » de l’adolescence à l’âge adulte (noir et blanc). ANK est donc en ça la fin « littérale » de Kimaguré Orange Road.
Ensuite, même si je considère les épisodes 47-48 comme la fin en apothéose de KOR avec la boucle temporelle, Kyosuke premier amour de Madoka et la scène finale mémorable. Que c’est pour moi la fin parfaite de KOR. A mon grand désarroi, ces 2 épisodes ne peuvent avoir eu lieu dans ANK. En tout cas pas tel quel. Pourquoi ? Car une nouvelle fois, les scénaristes insèrent à dessein une scène tendre de l’époque insouciante de nos 3 amis : ils consultent des photos d’enfance et Kyosuke est surpris de découvrir une Madoka garçon-manqué... Le message est clair : la déclaration mutuelle de l’épisode 48 qui tire sa source dans la compréhension que Kyosuke est le premier amour de la Madoka de 1982 n’a pas eu lieu pour la trame de ANK.
Est-ce à dire qu’on est resté cantonné à la posture caricaturale du triangle dans KOR comme c’est le cas dans les OAV ? Je ne pense pas. Je considère plutôt qu’on peut faire l’impasse sur cette déclaration à ce moment-là dans la mesure où le déroulé des évènements au fil des épisodes jusqu’au 46 fait que le couple Madoka-Kyosuke s’est stabilisé et est maintenant une réalité. Sans revenir dans le détail sur l’évolution de leur relation à travers l’anime (je garde ça pour une autre analyse), l’épisode 48 n’est que l’officialisation d’une évidence. Au fond d’eux, et même pour nous les spectateurs, ils sont déjà ensemble (si vous doutez, comptez le nombre de rdv officiels ou officieux ils ont une fois l’été passé…). Dans ANK, ils en sont à ce point, conscients de leur amour mutuel mais reste un dernier doute car il n’y a pas eu de déclaration. Doute qui va s’accentuer avec le baiser d’Hikaru.
Nous voilà donc au point d’inflexion du film. Le premier domino qui mènera à la fin du triangle est irrémédiablement basculé par celle qui en sera la principale victime.
C’est pour cela qu’à partir de cette scène, le comportement de Madoka va changer. Sans qu’on en ait pris conscience car l’évènement n’est pas montré, elle va être déstabilisée lorsque qu’Hikaru lui annonce triomphalement ce baiser qui va ébranler ses certitudes sur sa relation avec Kyosuke. L’impact n’aurait peut-être pas été si violent s’il y avait eu la déclaration sous le grand arbre.
Alors que jusqu’au baiser d’Hikaru, son seul souci sont les cours, on voit nettement l’inquiétude et la douleur que cet évènement inattendu engendre chez Madoka. Au point où elle n’arrive plus à se concentrer, à travailler, ni faire quoi que ce soit d’autre.
Elle comprend qu’elle « n’est pas si forte après tout ». Tout au long de l’anime, sa force de caractère lui a en effet permis d’affronter toutes les déceptions et les contre-temps. C’est ce qui la caractérisait. Mais pour la première fois, ses sentiments pour Kyosuke sont plus fort que tout et elle ne peut plus se ressaisir, prendre sur elle et y renoncer pour le bien de Hikaru. Vient alors la scène la plus poignante de film et peut-être de toute l’anime : le coup de téléphone à celui qu’elle aime et craint de perdre. L’intensité des quelques mots échangés, des silences, des émotions produites dans la voix de Madoka rendent cette version de la déclaration des sentiments de Kyosuke plus profonde encore que celle du grand arbre. Une vision si différente, moins poétique, plus ancrée dans la réalité mais tout aussi belle.
S’en suivra la dure réalité de devoir mettre un point final aux espérances de Hikaru. C’est pénible à suivre. On le vit avec douleur en voyant souffrir les personnages auxquels nous sommes attachés. Mais c’est le message que nous donne ANK : les ruptures quand l’amour a été sincère, comme ça a été le cas pour Hikaru, sont dévastatrices. Et il faut se battre pour s’en relever.
Et c’est ce que fait Hikaru. Elle nous montre la voie à suivre si d’aventure la vie nous confrontait à cette expérience de l’amour perdu.
Le choix de procéder au raccourci temporel dans la trame du récit permet de rendre plus acceptable ce que Madoka et Kyosuke lui ont fait vivre. Certes ils ont tardé, mais seulement quelques mois. Période durant laquelle les sentiments de Kyosuke pour Hikaru de vont pas évoluer. Ce qui lui donnait d’ailleurs l’opportunité de comprendre par elle-même l’impasse de cette relation et en sortir par la grande porte. Mais elle n’a pas voulu choisir cette option alors qu’elle avoue savoir depuis longtemps.
Elle a fait son choix. Les choses n’ont pas tourné en sa faveur. Il lui faudra rebondir.
Elle le fera.
Cette lecture d’ANK est-elle la bonne ? Je ne sais pas
Est-ce que je choisis le final réaliste de ANK ou celui plus poétique de l’épisode 48 ? Comme Kyosuke j’ai ma préférence, mais comme lui, je préfère ne pas choisir.
Une chose est sûre j’ai été touché en plein cœur par les moments clés du film. L’appel téléphonique, la douleur de Hikaru et évidemment le bang final. Ils ont laissé une trace profonde et prennent une place de choix dans les raisons pour lesquels j’aime KOR.
On aime, on déteste, on accepte, on rejette. Quoi qu’il en soit, ANK ne laisse pas indifférent. Esthétiquement parfait (surtout en HD). C’est un magnifique point final à l’anime. Un film profondément touchant et chargé en émotions. Et à mes yeux, ça lui donne toute légitimité dans l’univers de KOR.