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Contenu de CyberFred

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#52853 Les travaux de CyberFred

Posté par CyberFred sur hier, 23h42 dans Projets des fans

« La Première Marche »

par CyberFred

 

Épisode 27 – Le sacrifice d'une mère

 

 

C’était anormal.

Revenu de sa frayeur initiée par les mots-clés prononcés par Takashi, Kyosuke dérivait, lui et Hikaru, au sein d’un firmament sibyllin. Tous deux étaient suspendus dans un vide abyssal, un espace qui n’avait ni sol, ni ciel, ni horizon, ni limites. Ils flottaient, comme en apesanteur, dans un royaume d’étrangeté pure, une interdimensionnalité aux contours imprécis et aux couleurs versatiles. C’était comme si la réalité elle-même avait été fracturée, chaque éclat scintillant et changeant, reflétant des visions qu’aucune logique humaine ne pouvait appréhender.

Autour d’eux, l’espace se déployait dans une myriade infinie de formes et de motifs, formant tout un kaléidoscope vivant de textures et de lumières. Des courants lumineux, semblables à des rivières de néon, serpentaient dans toutes les directions, entrelacés en une danse hypnotique. Ces courants pulsaient au rythme d’une énergie invisible, une force vitale qui semblait imprégner cet espace de sa présence vibrante. Parfois, ils s’entrechoquaient, créant des explosions silencieuses de couleurs qui s’étalaient en vagues et en spirales.

Des structures impossibles flottaient également, des formes géométriques à la fois familières et étrangement déformées, comme des polyèdres en perpétuelle mutation. Elles semblaient construites de matériaux translucides, émettant une lumière douce et iridescente qui changeait constamment de teinte. Parfois, ces structures se décomposaient en fragments brillants, avant de se réassembler en de nouvelles configurations, comme si l’architecture de cet espace était en perpétuelle création et destruction.

Au-delà de ces courants et de ces structures, des visions hallucinantes apparaissaient et disparaissaient à l’infini. Des éclats de paysages oniriques surgissaient comme des mirages : des forêts aux arbres luminescents dont les feuilles brillaient d’une lumière intérieure, des océans suspendus où des vagues liquides s’écoulaient lentement dans le vide, formant des cascades éphémères qui se dissipaient en brume scintillante… Et tant d’autres possibilités…. Ces visions étaient accompagnées de sons étranges et envoûtants, des mélodies lointaines éthérées et des murmures indéfinis qui semblaient surgir des profondeurs de cet espace multidimensionnel.

Kyosuke et Hikaru sentaient également une étrange pression autour d’eux, comme si tout cet espace était vivant, conscient de leur présence. Cette conscience diffuse les enveloppait, leur insufflant des sensations et des émotions qu’ils ne pouvaient définir. C’était une communication sans mots, une connexion directe avec l’essence même de cette interdimensionnalité. Ils pouvaient presque sentir les échos des autres univers, des réalités parallèles qui se frôlaient et se chevauchaient dans cet espace liminal, créant un tissu complexe aux possibilités infinies.

Les deux jeunes gens étaient à la fois prisonniers et explorateurs de ces lieux, telles des particules errantes au sein d’un océan de potentialités. Chaque instant passé dans cet espace interdimensionnel les imprégnait d’une compréhension plus profonde de la nature de la réalité, une réalité qui dépassait de loin les limites de leur imagination et de leur savoir.

Ainsi, dérivaient-ils au sein de ce royaume au-delà des mondes, leur esprit s’ouvrant peu à peu aux merveilles et aux mystères de cette dimension autre, où chaque vision constituait un fragment d’un puzzle cosmique, et chaque sensation un fil cousu dans la tapisserie infinie du Multivers. Ils ressentaient une étrange sérénité, une compréhension intuitive des mystères de cet espace. Ici, les limites de l’existence étaient floues, et tout semblait possible. Ils se savaient connectés à quelque chose de plus grand : une toile cosmique où chaque filament représentait une existence, une histoire, un univers entier.

La main d’Hikaru, dont on cherchait à lui faire regagner son monde d’origine par ce voyage interdimensionnel interrompu, était tenue fermement par celle du jeune homme qui flottait à ses côtés. Pour elle, tout cela pouvait évoquer une téléportation immobile initiée par son Kyosuke, qu’elle espérait retrouver bientôt. Mais toutes ces visions incroyables des alentours étaient situées au-delà de sa propre compréhension.

– Où… où est-on ? demanda la jeune fille. Que s’est-il passé ?... Pourquoi ne sommes-nous plus dans le salon ?...

Kyosuke regardait tout autour de lui, cherchant un repère, décryptant l’inconnu, déchiffrant l’impossible. Il était incapable de réfléchir à un moyen de s’échapper d’ici pour le moment.

– Nous tentons de rentrer chez toi, dans ton monde, expliqua-t-il seulement.

Les yeux de la jeune fille se chargèrent d’un espoir soudain.

– Tu… tu veux dire que je vais retrouver mon Kyosuke ?...

– Ce n’est pas si simple. Si nous parvenons dans ton monde, je vais normalement et temporairement échanger ma place avec lui. Ton Kyosuke devra alors revenir dans le mien.

– Comment ?!... s’étonna Hikaru. Mais, alors… il ne sera plus là que je rentrerai ?!...

– Juste le temps pour moi de ramener Ayukawa avec moi vers mon univers. Et tout se passera bien.

Hikaru, déjà agacée par la tension qui avait régné entre elle et Kyosuke dans le salon de Madoka, se sentit à nouveau contrariée par la situation. Néanmoins, elle comprit qu’il lui fallait faire preuve de patience pour que chaque pièce du puzzle s’assemble harmonieusement à la fin.

– Mais où sommes-nous, ici ? demanda-t-elle encore.

– Nous sommes dans une sorte de dimension intermédiaire d’entre les mondes, répondit Kyosuke.

– Mais… n’étions-nous pas supposés revenir instantanément dans le mien ?

– Oui, en effet, mais quelque chose nous retient ici. Nous ne parvenons plus à avancer. Nous avons été stoppés en pleine route pour une raison que j’ignore.

Hikaru plongea dans une certaine inquiétude. Allaient-ils tous deux rester prisonniers de cet endroit pour toujours ?... Son propre sort ne dépendait désormais que de ce double de son Kyosuke allait décider ou faire. Ce Kyosuke-là semblait ne pas avoir vraiment prise sur ces manifestations étonnantes qui formaient tout ce décor fantastique. C’eût été différent avec son Kyosuke. Au moment du départ depuis le salon, ce type avait été pris d’une crainte inexplicable, puis ils se sont instantanément retrouvés ici.

– Avoue que ceci n’est pas normal, fit Hikaru, qui commençait à moins supporter les visions incroyables que lui renvoyait inlassablement ce sous-espace.

Kyosuke songea à Kurumi et au déploiement incontrôlé du Pouvoir dont elle faisait montre, depuis que Madoka - enfin son double - était sous sa coupe. Même si elle n’était pas celle qu’il aimait, il devait faire quelque chose pour la tirer d’affaire, et parvenir en même temps à stopper la crise que manifestait dangereusement sa petite sœur. S’il ne parvenait pas à atteindre l’autre univers pour chercher du secours, nul ne savait quel destin allait subir son propre monde, ainsi que sa famille qu’il venait de quitter.

– Est-ce que tu sais comment repartir d’ici ? demanda Hikaru.

– Je ne sais pas, admit le jeune homme.

– Tu as bien le Pouvoir, toi aussi, n’est-ce pas ? C’est bien toi qui sais comment franchir ces dimensions ?

– Oui, mais, j’ignore pourquoi nous sommes bloqués ici.

– Nous voilà bien !...

Hikaru remarqua alors qu’elle tenait toujours la main de Kyosuke.

– Mais pourquoi devons-nous encore nous tenir la main ? émit-elle, quelque peu gênée par cette sorte d’intimité imprévue avec le double de son Kyosuke.

– Hikaru, il est impératif que nous nous tenions continuellement la main, car tu représentes un « compas » pour nous guider vers ton monde. Si je disparaissais soudainement sans nous tenir la main, tu resterais toute seule ici sans possibilité d’être secourue. De plus, tu vois que dérivons, actuellement… Si nous nous lâchions la main, on s’éloignerait l’un l’autre, sans possibilité de nous rejoindre.

La jeune fille admit qu’il y avait là du bon sens. Elle fit donc mauvaise fortune bon cœur.

Les deux jeunes gens flottaient toujours au sein d’un océan de couleurs aux intensités inimaginables, se mouvant en vagues hypnotiques, des teintes d’outremer fusionnant avec des nuances de pourpre, des verts émeraude éclatants se fondant dans l’éther. À leurs yeux, chaque couleur semblait avoir sa propre vie, sa propre intention, se mélangeant et se séparant dans une danse perpétuelle.

Des sphères lumineuses flottaient autour d’eux, grandes comme des planètes, mais d’une légèreté incroyable. Elles étaient faites de pure énergie, émettant des filaments de lumière qui ondulaient comme des cheveux sous l’eau. En dérivant vers ces manifestations ne pouvant être tangibles, Kyosuke pouvait percevoir en elles des scènes d’autres mondes, des fragments de réalités parallèles. Certaines montraient des paysages étranges peuplés de créatures fantastiques, d’autres des cités brillantes faites de lumière pure. Chaque sphère représentait une réalité alternative, un aperçu d’un autre univers.

– Je crois que nous ne devons pas nous en approcher, fit Kyosuke avec méfiance. Car ces mondes ne peuvent pas nous accueillir.

– Et quand bien même ? fit Hikaru. Nous pourrions-nous pas faire une pause ?

– C’est ton propre monde que nous devons atteindre, et nul l’un d’eux.

– Mais comment as-tu fait pour parvenir jusqu’ici ?

– Mon père a prononcé des mots particuliers qui ont permis ce voyage.

– Des mots ?...

– Oui, juste avant de partir.

– Lesquels ?

– Je ne sais plus. On m’a hypnotisé pour que je ne puisse pas les retenir si on me les prononçait.

Hikaru tenta de se remémorer ce qui avait été dit par le père de Kyosuke juste avant qu’elle et lui ne s’évanouissent du salon. Elle se souvint que des mots avaient été prononcés, mais ils étaient étranges.

– Oui, ton père a dit quelque chose de rapide… Des mots en anglais… mais je n’arrive pas à m’en souvenir. Tout est allé trop vite. Mais si j’arrivais à m’en rappeler, est-ce que cela pourrait nous permettre de repartir d’ici ?

– Je ne sais pas, fit Kyosuke, hésitant. Normalement, il faut que cela soit prononcé dans un monde tangible, et non ici. J’ignore complètement ce qui se passerait si j’entendais ces mots en de tels lieux. Tu comprends pourquoi je ne souhaite pas aller vers ces mondes ? Sans connaître ces mots-clés, il ne faut surtout pas nous retrouver sur l’un d’eux, au risque de ne plus jamais en repartir.

– Je… je comprends, fit Hikaru calmement. C’est clair.

Flottant inlassablement au cœur de toute cette immensité hallucinante, Kyosuke sentit son esprit vaciller petit à petit sous la surcharge sensorielle. Hikaru le ressentait aussi. Ces effets n’étaient pas trop intenses pour le moment, mais viendrait le moment où même s’ils se forçaient tous deux à fermer les yeux, leur esprit ne pourrait éviter les effets hypnotiques de ces lieux pouvant traverser tous ses sens.

Kyosuke tenta d’utiliser son pouvoir télékinésique pour avancer devant lui, mais ce fut peine perdue car leur progression restait assez lente. Même une téléportation ne parvint pas à faire avancer plus vite.

– Mais qu’est-ce que tu essaies de faire ? demanda Hikaru intriguée.

– C’est peine perdue, laissa tomber son compagnon de voyage, la lassitude se lisant sur son visage.

Soudainement, un tourbillon s’ouvrit non loin d’eux, déchirant le tissu-même de cet espace étrange. C’était comme un portail, pulsant et doté d’une force irrésistible, une spirale de lumière et d’énergie tourbillonnant, projetant des éclats scintillants dans toutes les directions. La force d’attraction qui en émanait était palpable, tel un vent cosmique aspirant tout sur son passage.

Kyosuke et Hikaru sentirent immédiatement la puissance du vortex, une force implacable qui cherchait à les engloutir. Instinctivement, Kyosuke activa son Pouvoir, cherchant à créer une barrière télékinésique autour de lui et Hikaru, ce qui permit de résister plus ou moins à la force d’attraction, mais pas de s’en éloigner. Cependant, la jeune fille, qui tenait la main de Kyosuke, était la plus proche du danger.

– Hikaru, tiens bon ! cria Kyosuke, sa voix résonnant comme un écho étouffé dans l’immensité interdimensionnelle.

Surprise et effrayée, la jeune fille s’accrochait désespérément à Kyosuke, ses doigts serrant sa main de toutes ses forces. Attirées, ses deux jambes pointaient déjà en direction du centre du vortex. Ses yeux reflétaient une panique croissante, sa respiration rapide et saccadée trahissant sa terreur. Elle pouvait sentir la puissance implacable du portail tirer sur elle, une force qui semblait vouloir la déchirer de son ancrage représenté par la seule main du jeune homme.

– Ky… Kyosuke, je n’y arriverai pas ! hurla-t-elle, sa voix tremblante d’émotion.

Le regard du jeune homme porta vers l’intérieur du tourbillon de plus en plus proche. À travers la spirale de lumière et d’énergie, il distingua des images familières. C’était son propre monde, son univers d’origine, qui le rappelait à lui.

Il comprit alors ce qui était en train de se passer. Le Pouvoir de Kurumi était devenu tellement puissant qu’il commençait à émaner au-delà même de la dimension tangible de la réalité. Kurumi continuait à pulser quelque chose de plus en plus immense, se manifestant comme un puissant attracteur cherchant à se frayer un chemin vers la source-même du Pouvoir, quitte à replier l’espace-temps tout autour d’elle. La Terre entière n’était pas touchée, mais seulement le quartier autour de la résidence des Ayukawa. Cette « bulle » grossissait petit à petit malgré tout, progressant sans détruire, mais inondant tout l’espace de vibrations subtiles pouvant se montrer dangereuses si on laissait faire les choses. C’était ce que sa propre mère avait évité de justesse le jour de la naissance de Kurumi, mais au prix de sa propre vie.

Tout semblait inciter Kyosuke à lâcher prise, à se laisser emporter par cette force implacable. Pourtant, cela lui était interdit car il devait rejoindre le monde où était Madoka, qui était seule et sans possibilité de revenir chez elle. Kyosuke savait qu’il ne pouvait pas non plus abandonner Hikaru, et qu’il ne pouvait pas revenir vers son propre monde, car cela serait la fin de tout. Il lui serait alors impossible d’en repartir.

– Non ! rugit-il à la vue du tourbillon se rapprochant de plus en plus vite, concentrant toute son énergie pour résister à l’attraction.

– Je ne te laisserai pas partir ! hurla-t-il à la jeune fille.

Mais Hikaru, épuisée par l’effort et la peur, sentait ses forces l’abandonner. Ses doigts glissèrent lentement, son emprise se desserrant malgré elle, malgré tous les efforts de la part de Kyosuke pour garder prise. Ses yeux se remplirent de larmes alors qu’elle sentait l’inévitable se produire.

– Kyosuke...

Et puis, ce fut fini. Sa main glissa de celle du jeune homme, et elle fut aspirée violemment dans le portail. Elle hurla, son corps disparaissant dans la spirale de lumière et d’énergie. Hurlant également, Kyosuke tendit la main dans un dernier geste désespéré pour rattraper une main toujours tendue vers lui, mais il était déjà trop tard. Hikaru était partie, définitivement emportée à travers ce portail.

Alors que Kyosuke allait se faire aspirer à son tour, le tourbillon commença étrangement à se refermer, ses bords se recroquevillant jusqu’à disparaître complètement, laissant le jeune homme dans un silence assourdissant.

Abasourdi, Kyosuke resta là, flottant seul dans l’immensité interdimensionnelle, un sentiment d’impuissance envahissant son âme. Il voulut se rassurer en supposant que Hikaru était revenue au point de départ, qu’elle était sauve, dans le salon des Ayukawa, et que son père devait être à ses côtés pour la rassurer.

Pourquoi le portail, ayant emporté Hikaru, s’était-il refermé, alors qu’il était censé se maintenir et même progresser ? L’énergie incontrôlée de Kurumi, tentant de percer à travers le sous-espace, avait-elle fait une pause, avant de revenir plus tard ?... Ou bien le retour inattendu de Hikaru avait-il empêché cette énergie de retrouver toute trace de Kyosuke ?... Tout était possible.

Kyosuke s’interrogea sur la suite de son propre voyage. Sans Hikaru pour la guider vers le monde où résidait actuellement Madoka, il était désormais impossible de pouvoir s’orienter. Il demeurait isolé, perdu entre les dimensions, dans un espace où le temps et la réalité semblaient toujours se confondre et se dissoudre.

Épuisé et désorienté par la pression des lieux qui inondaient de plus en plus son esprit d’images et de sons franchissant ses sens de manière incessante, Kyosuke commença à désespérer. Même sans portail aspirant, il lui serait bientôt impossible de tenir en ces lieux. Tout semblait se resserrer de plus en plus autour de lui, créant en lui une sensation d’oppression étouffante. Allait-il devenir fou ?... Son esprit résisterait-il encore longtemps aux visions hallucinantes des coulisses du Multivers ?... Il était à présent inutile de fermer les yeux sans ressentir un vertige. Kyosuke préféra les laisser ouverts, mais pour combien de temps encore ?... Il songea à ses proches, à sa famille qui voyait en lui l’espoir de sortir d’une crise gravissime. Il songea à Madoka, qui désirait et priait ardemment son retour.

« Kyosuke… »

Une voix… ?

« Kyosuke… »

Kyosuke entendit résonner autour de lui une voix douce et apaisante. La voix d’une femme.

– Où êtes-vous ? demanda Kyosuke.

Au début, il crut à une hallucination, un autre tour de l’esprit qui vacillait sous la pression de cet endroit inconcevable. Mais la voix persistait, claire et insistante. Il se retourna lentement, cherchant la source de cet appel.

Devant lui, dans un éclat de lumière douce et chaleureuse, apparut le visage d’une jeune femme. Une projection venue d’ailleurs, et non de ces lieux. Comment était-ce possible ?... Les traits de la femme étaient empreints de douceur et de familiarité. Elle souriait à Kyosuke avec une tendresse infinie. Le jeune homme sentit son cœur s’arrêter un instant, incapable de croire ce qu’il voyait.

– Maman... ? reconnut-il, la voix murmurante et tremblant d’émotion.

La femme hocha doucement la tête, ses yeux brillant d’une joie apparente.

Il s’agissait bien d’Akemi Kasuga, sa mère, telle qu’il l’avait vue dans les albums-photos. Elle était bien celle de son propre monde, et non l’alter-ego issu d’un autre univers parallèle venu se projeter ici par hasard. Le visage de la mère de Kyosuke était apparu devant lui avec une clarté qui défiait les années de séparation. Elle avait les cheveux courts et marron clair, coupés en une coiffure élégante qui encadrait parfaitement son visage délicat. Ses mèches brunes semblaient danser doucement autour de son visage, captant la lumière iridescente de cet espace interdimensionnel, et la reflétant en nuances chaudes et réconfortantes.

Ses yeux, d’un violet profond et envoûtant, étaient la première chose que Kyosuke remarqua. Ces yeux, si uniques et mémorables, brillaient d’une intelligence vive et d’une tendresse infinie. Ils semblaient contenir une myriade de souvenirs et d’émotions, chaque clignement de ses yeux semblant porter une promesse de protection et d’amour inconditionnel. Les pupilles dilatées, les iris violets renvoyaient des reflets lumineux, créant une aura mystique tout autour d’elle.

Le sourire d’Akemi était radieux, illuminant tout son visage d’une chaleur bienveillante. Ses lèvres pleines et rosées s’étiraient en un sourire qui dégageait à la fois douceur et force, une expression qui parlait de joie profonde et de détermination indéfectible. Ce sourire était la source de réconfort que Kyosuke avait tant de fois cherché dans ses lointains souvenirs d’enfant. Chaque fois qu’il le revoyait, même en photo, il se sentait immédiatement transporté dans un endroit sûr et aimé.

Les joues d’Akemi étaient légèrement rosées, donnant à son visage une apparence de jeunesse et de vitalité. Elle avait une peau douce et claire, marquée par un petit grain de beauté, qui ajoutait un charme innocent à son visage. Ses traits étaient fins et gracieux, avec un nez délicatement sculpté et des pommettes hautes qui soulignaient encore davantage son sourire éclatant. Ses sourcils étaient finement dessinés, s’arquaient légèrement, ajoutant une expression constante de curiosité et de compassion à son regard.

Pour Kyosuke, redécouvrir ce visage après tant d’années était une expérience bouleversante. Il se souvenait de chaque détail avec une précision émotive, chaque caractéristique ravivant des souvenirs enfouis de tendres moments partagés. La vue de sa mère, bien plus impressionnante qu’en photo, avec ses cheveux courts marron, ses yeux violets enchanteurs et son sourire radieux, était comme un baume pour son âme tourmentée. C’était une vision qui lui apportait à la fois réconfort et une douleur douce-amère, lui rappelant l’amour perdu, mais jamais oublié.

– Oui, Kyosuke, c’est bien moi, ta maman. Ma voix provient du passé, d’il y a longtemps pour toi. Tu as tant grandi !

Kyosuke était stupéfait. Comment était-ce possible ? Comment sa mère, disparue depuis longtemps, pouvait-elle lui parler à travers les dimensions et le temps ?

– Mon esprit se projette à travers les dimensions, poursuivit-elle. Alors que ta petite sœur, Kurumi, vient de naître.

– Kurumi… Oh grand ciel !…

Akemi était en train de communiquer avec son fils, au moment où un terrible drame allait se produire pour elle de manière imminente. Quand Kyosuke fut en âge de comprendre, son père, Takashi, lui avait raconté que dès le début de la crise qu’avait manifesté Kurumi à sa naissance, sa mère avait immédiatement téléporté de force tout le monde à l’extérieur de la clinique, dont les fondations avaient commencé à vibrer dangereusement : lui (âgé de deux ans), son père Takashi, Manami (qui venait de naître ce jour-là, peu avant Kurumi), ainsi que les patients et tout le personnel médical. Il était impossible pour Akemi de se téléporter elle-même, du fait que Kurumi mettait involontairement des barrières de Pouvoir partout, tout autour d’elle. Mais il n’était pas question pour Akemi de laisser Kurumi toute seule. Elle était restée avec elle… jusqu’au bout.

– J’ai hélas peu de temps, mon enfant, reprit Akemi. Ta petite sœur, qui vient de naître, manifeste un pouvoir devenu incontrôlable. Elle n’est en rien fautive. En résonance aux vibrations de plus en plus intenses qu’elle projette, j’ai vu dans le futur que tu te retrouverais ici, perdu entre les sphères dimensionnelles, confronté à une crise similaire avec Kurumi.

– Maman…

La voix d’Akemi était douce mais ferme, emplie de l’autorité d’une mère protectrice :

– Je suis ici pour t’aider, Kyosuke, mais je ne puis atteindre ta sœur de ton temps présent pour la guérir de sa colère. Mais avant de te contacter, j’ai pu refermer provisoirement le portail qui cherchait à te faire revenir à elle.

– C’était donc toi ! souffla le jeune homme. Et Hikaru ?...

– Je suis hélas arrivée trop tard pour empêcher ce que tu as vu, mais ton amie Hikaru est retournée d’où vous êtes partis. Rassure-toi, elle va bien. Cependant, je ne pourrai pas longtemps contenir les spasmes de Pouvoir que ta sœur commence à disséminer à travers les Sphères. Ce portail aspirant pourrait se reformer, et revenir te chercher si tu restes trop longtemps là où tu es. Je vais donc te donner une partie de mon pouvoir pour que tu puisses poursuivre ton voyage vers la dimension que tu cherches à atteindre.

– Comment vas-tu faire ? Sais-tu comment t’y prendre ?...

– Sache que tu as hérité de mon don du voyage interdimensionnel, don que je n’ai jamais souhaité utiliser moi-même, sauf aujourd’hui. Ce pouvoir concerne aussi ta sœur Manami, d’une certaine manière. Mais ne t’inquiète pas pour elle, elle va bien aussi, et sillonne vers son destin. Je sais qu’en mon absence, tu as découvert ce don par accident, mais que tu ne contrôles pas encore très bien. Mais j’ai confiance en toi : tu parviendras à le maîtriser un jour, comme je l’ai fait autrefois.

– Maman…

Akemi coupa son fils à regret, car son temps à elle lui était de plus en plus compté pour les explications urgentes :

– Kyosuke, quand tu atteindras le monde que tu recherches, tu devras trouver le moyen d’apaiser la crise qui frappe Kurumi, en cherchant toute l’aide que tu parviendras à trouver. Il y a espoir ! L’autre partie de mon pouvoir, je vais l’offrir à Kurumi, qui vient de naître, pour qu’elle puisse maîtriser et canaliser son pouvoir pour les années à venir.

Kyosuke secoua la tête, la panique et la douleur se mêlant dans tout son esprit chamboulé.

– Maman ! Non, non, je ne peux pas accepter ça ! Donne ton pouvoir à Kurumi, mais gardes-en en toi, s’il te plait ! Tu en as plus besoin que moi ! Je peux trouver une autre solution. Tu peux être sauvée !

Akemi sourit, une expression de fierté et de tristesse se dessinant sur son visage :

– Mon petit Kyosuke, je suis si fière de toi. Mais tel est mon devoir. Je connais ma destinée. Elle ne peut pas changer. Je lis ton esprit. Je sais la peine que tu as subie autrefois par mon absence, alors que tu étais si jeune. Mais je suis déjà comblée par la belle vie que tu as menée, toi, tes sœurs et papa. Je vous sauverai tous, ce sera ma plus grande satisfaction.

– Maman…

– Kyosuke, je dois assurer non seulement le présent et le futur de Kurumi, qui vient de naître, mais aussi tout votre futur. Savoir que Madoka fait partie de ta vie et que tu cherches aussi à la secourir, me remplit de joie. Elle t’aime et te soutient. Continue à la protéger et à l’aimer, comme tu le fais si bien. C’est une raison de plus pour que je t’aide maintenant et plus que jamais. Je peux le faire, quoi qu’il arrive. Je ne vois pas l’avenir au-delà de ton temps présent, mais mes prières vont vers toi, tes sœurs, papa, tes cousins, et tous ceux que tu aimes.

Kyosuke hocha la tête, sa gorge nouée par l’émotion. Les larmes commençaient à couler sur ses joues.

– Maman, si tu nous donnes tout ton pouvoir, tu... tu pourrais… insista Kyosuke.

Les yeux brillants de sa mère répondirent avec tendresse et une détermination inébranlable.

– Mais mon amour pour vous est plus fort que tout, dit-elle doucement. Je veux que vous viviez toujours heureux.

Akemi clôt alors ses yeux et eut un moment de concentration. Kyosuke sentit alors une énergie immense le traverser, réchauffant son corps et son esprit. Le Pouvoir donné n’a pas de frontières. Une sorte d’aura semblait l’entourer, les visions se clarifiant un instant, repoussant les troubles subis jusqu’alors.

Les larmes de Kyosuke coulèrent inlassablement sur ses joues, alors qu’il contemplait le visage rayonnant de sa mère, qui rouvrit les yeux. La clarté retrouvée de l’esprit du jeune homme permit aux souvenirs d’enfance, parfois effacés par le sillage du temps, d’affluer. Il se rappela alors des moments de bonheur et de sécurité avec sa mère. Bien qu’apparue ici comme une vision devant lui, elle semblait à présent étrangement réelle dans son esprit.

– Maman... murmura-t-il, sa voix brisée par l’émotion en contemplant sa mère lui sourire doucement.

Pour Kyosuke, c’était comme s’il était de nouveau un enfant, cherchant réconfort dans la présence rassurante de sa mère.

– Maman, je... je ne veux pas te perdre ! dit-il d’une voix tremblante. Il y a tant de choses que je veux te dire, tant de choses que je veux partager avec toi…

Akemi hocha doucement la tête, son sourire se faisant plus triste, mais toujours aussi tendre.

– Je sais, mon chéri. Mon cœur se serre très fort, mais j’éprouve une immense gratitude de pouvoir te dire au revoir, toi que je peux atteindre, te voir et te parler dans le futur. Sache que je serai toujours avec toi, dans ton cœur. Chaque décision que tu prends, chaque pas que tu fais, je serai là, veillant sur toi.

Les larmes de Kyosuke coulèrent plus que jamais.

– Je t’aime, maman ! hurla Kyosuke. Merci… merci pour tout ce que tu as fait pour nous !...

– Je t’aime aussi, mon enfant. Je t’embrasse tendrement. J’embrasse aussi tes sœurs et papa.

– Maman !...

– Adieu, mon Kyosuke, murmura-t-elle, sa voix se fondant dans l’immensité interdimensionnelle. N’oublie jamais que je suis toujours avec toi dans chaque battement de ton cœur…

L’aura d’Akemi s’éteignit doucement, et son visage disparut dans le firmament.

Kyosuke ressentit une émotion immense traverser son esprit.

– Maman !! cria-t-il une dernière fois, sa voix se perdant dans l’infini. Maman !... Reviens !...

La douleur de la séparation était déchirante. Kyosuke, brisé par ce dernier adieu maternel, sentait pourtant une nouvelle force émerger en lui, comme si l’amour et le pouvoir de sa mère le guidaient désormais. Elle était partie pour toujours, laissant derrière elle une sensation de paix et de réconfort dans le cœur de son fils. Les yeux embués de larmes, Kyosuke savait qu’il devait poursuivre sa route. Le sacrifice de sa mère ne serait pas vain. Grâce à elle, il trouverait un moyen de sauver Kurumi. Il devait être plus fort que jamais. Le cœur lourd mais résolu, Kyosuke se lança à nouveau dans l’inconnu, désormais guidé par un cap précis, portant en lui l’amour éternel de sa mère.

 

 

 

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#52849 Les 40 ans de KOR

Posté par CyberFred sur 16 juin 2024 - 21h49 dans Forum principal

Je crois que si.




#52839 Les 40 ans de KOR

Posté par CyberFred sur 16 juin 2024 - 11h39 dans Forum principal

Kody a dit sur KORSE qu'il irait à l'expo d'Osaka mais il ne prend pas de commandes.

 

Oui son départ est pour bientôt.




#52827 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 15 juin 2024 - 21h37 dans Goodies

Ah je vois que Baltique a fait des recherches spécifiques. Ok, bien vu, c'est un autre exemple, mais celui-ci est adapté au personnage qu'on veut mettre en évidence par effet éthérique, vu qu'il n'y a aucun décor derrière. Quant à Madoka baskets, il me paraissait étrange qu'avec un décor de palmiers et de plage, on rajoutât un tel flou quelque peu envahissant.

 

 

Je pense qu'elle simplement colorié le centre et laissé l'aquarelle s'estomper naturellement sur les bords. C'est assez courant. Ça crée un effet onirique. 

 

C'est un peu la même chose avec ce tableau, par exemple :

 

orange_hanga7-2_1000x.jpg?v=1632820671




#52822 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 15 juin 2024 - 14h04 dans Goodies

Ok, mais je trouve étonnant que ce flou progressif, il n'y a que sur cette toile qu'elle l'a pratiqué à ma connaissance. 




#52819 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 15 juin 2024 - 12h13 dans Goodies

A mon avis, l'effet de brouillard sur tous les côtés cache quelque chose qu'on ne sait pas. J'ignore si la peinture originale sera exposée.

 

Et dire que la Madoka Ange n'a pas été présentée à cette expo, ni même en sérigraphie. 




#52816 Quel a été votre premier goodie KOR ?

Posté par CyberFred sur 15 juin 2024 - 12h00 dans Sondage

J'ai fait un update de mon post à propos de mon premier goodie --> CLIC




#52811 Les 40 ans de KOR

Posté par CyberFred sur 15 juin 2024 - 11h28 dans Forum principal

Le site n'est pas à jour. Et on se demande où se trouve le filmgraph de la mariée, que l'on voit exposée dans la partie des tableaux exposés.




#52809 Rencontre koresque 2024

Posté par CyberFred sur 15 juin 2024 - 11h17 dans Annonces

Au Japon, ils ont fait une rencontre dans un resto avec plusieurs dizaines de fans dont une cosplayeuse habillée dans une réplique du sefuku que l'on voit dans l'anime. Projections et exposition de goodies.

 

Je ne sais pas si on va y arriver à ce niveau, mais avec plaisir retrouvons-nous dans Paris, mais loin des manifs.




#52807 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 15 juin 2024 - 11h15 dans Goodies

Oui, les doigts.... c'est ce que je n'aime pas dans ce tableau. Il y a aussi l'effet de myst/flou qui est trop prononcé à droite. 




#52778 Artbook des 40 ans de KOR

Posté par CyberFred sur 12 juin 2024 - 23h04 dans Goodies

Je préfère avoir ce petit art book et attendre un autre qui sortira dans quelques années. Ok, il est décevant, mais un vrai artbook comme la Madonna sera forcément parfait s'il sort un jour, avant les 50 ans de KOR.




#52764 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 12 juin 2024 - 18h19 dans Goodies

Pour l'essui à lunettes, possiblement, il y a eu "extension" de l'image par du floutage sur les côtés pour satisfaire le format de l'étoffe.

 

Mais ce n'est pas là le plus grave.

 

En effet, ta remarque m'a alerté sur le fait que la sérigraphie limitée que l'on voit en visu sur la page de l'anniversaire , est elle-même tronquée sur la gauche de la peinture !! Je le vois en comparant la même image présente dans l'artbook "La Madonna". C'est vraiment tronqué sur la sérigraphie. Ceci est très troublant, parce que cette sérigraphie est censée, vu son prix, représenter l'intégralité de la peinture originale. Or ici, ce n'est pas le cas. Donc, avis aux acheteurs : le produit vendu est tronqué.




#52760 Artbook des 40 ans de KOR

Posté par CyberFred sur 12 juin 2024 - 07h32 dans Goodies

Ou un catalogue d'exposition mais qui ne montre pas tout de l'exposition....




#52758 Artbook des 40 ans de KOR

Posté par CyberFred sur 11 juin 2024 - 21h43 dans Goodies

Hé ben, je vais être déçu quand je vais recevoir ce truc.

Enfin, ce sera un collector à terme.




#52755 Artbook des 40 ans de KOR

Posté par CyberFred sur 11 juin 2024 - 20h03 dans Goodies

Intéressant. J'ai hâte de recevoir mon ouvrage, qui est toujours au Japon. J'ai fait une traduction française sur mes actus 2024 il y a quelques temps. S'agit-il de l'interview que tu vois dans l'ouvrage ?




#52739 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 10 juin 2024 - 12h20 dans Goodies

Je vois l'annonce sur le groupe Facebook de Suet Suet.




#52726 KOR en 48 semaines

Posté par CyberFred sur 09 juin 2024 - 12h17 dans Réflexions

FrozenOwl : ah avec tout ça, je t'ai rajouté un petit projet en plus. Prends ton temps, on n'est pas pressés. En tous cas, je publierai le texte et les illustrations que tu souhaiteras. Merci à toi :)




#52725 Les travaux de CyberFred

Posté par CyberFred sur 09 juin 2024 - 12h01 dans Projets des fans

Oui tu as raison. J'ai pris du retard car il y a des weekends ou je n'ai rien publié. Mais mon inspiration m'oblige aussi à dépasser le timing prevu. 26 chapitres déjà, c'est pas si mal, pour une histoire qu'il ne dure que le temps d'une soirée. Il y a eu beaucoup d'actualité Kor cette année avec les expos. Mais si je mords sur l'été, ce ne sera pas grave. Le plus important est que tu puisses apprécier comme tu le fais les publications. Et puis l'année des 40 ans dure jusqu'en décembre, aussi. On verra comment tout cela finira.



#52717 Les travaux de CyberFred

Posté par CyberFred sur 08 juin 2024 - 18h39 dans Projets des fans

« La Première Marche »

par CyberFred

 

Épisode 26 – Elle

 

 

Madoka et Kenji arrivèrent bien avant l’heure butoir à l’entrepôt 6 du quartier portuaire de Yokohama, désigné par la mystérieuse femme dont ils ne connaissaient toujours pas le nom. Aucun garde ou vigile en vue. Les deux jeunes gens coupèrent les moteurs, descendirent de leur moto, et laissèrent leurs casques accrochés aux guidons.

Tous deux contemplèrent l’édifice imposant et sombre qui se dressait devant eux, telle une forteresse dissimulant des secrets inavouables. Aucun éclat lunaire ne vint illuminer cet endroit.

– Si j’avais su que le lieu du rendez-vous était aussi proche de chez toi, Ayukawa… commença Kenji.

– Chut ! coupa la jeune femme, intriguée par le silence pesant qui régnait étrangement en ces lieux.

– Quoi ?...

– Ce silence ne me dit rien qui vaille.

– Bien sûr qu’il s’agit d’un piège, répondit le jeune homme avec assurance. Pas de gardes visibles à l’extérieur, donc... ils nous attendent tous à l’intérieur.

Madoka sentit que Kenji avait probablement raison, mais cela lui importait peu. La vie de personnes chères comme Kyosuke, et même d’Hikaru (bien que celle-ci n’était pas de son propre univers), était bien plus précieuse à ses yeux.

Avec une démarche gracieuse et prudente, Madoka s’avança vers la seule entrée possible de ces lieux : une porte métallique non verrouillée. En revanche, la grande porte coulissante du hangar, disposée juste à côté, était hermétiquement fermée, certainement à dessein. Le faible éclairage extérieur qui avait aidé les deux jeunes gens à s’approcher rapidement du bâtiment ne permettait pas de voir à l’intérieur. Tout était plongé dans une obscurité totale. Kenji se reprocha de ne pas avoir emporté une torche électrique avec lui. Madoka, de son côté, supposa que le contrôle des lumières n’était pas accessible depuis la porte par laquelle ils devaient entrer. Une précaution bien pensée de la part de ceux qui les attendaient.

Madoka et Kenji échangèrent un regard complice avant de pénétrer à l’intérieur. L’unique entrée les conduisit directement à une vaste salle plongée dans l’obscurité totale, ou presque : un mince filet de lumière parvenait tout juste de l’extérieur, ne présentant devant eux que le sol cimenté qui guidait leurs pas. Ils progressèrent prudemment, en faisant résonner le béton froid sous leurs semelles. Lorsqu’ils atteignirent le centre de la pièce, la porte d’entrée par laquelle les deux jeunes gens étaient arrivés se referma brusquement derrière eux. Une lumière éclatante inonda soudainement tout l’espace, les aveuglant momentanément.

Surpris, Kenji et Madoka essayèrent de s’adapter un instant à la luminosité. Une douzaine de motos surgit de l’obscurité, leurs moteurs rugissant soudainement. Les pilotes, casqués et arborant des visières opaques dissimulant leurs regards, étaient tous vêtus de combinaisons blanches. En un instant, ils formèrent un large cercle en mouvement autour de Madoka et Kenji, bloquant toute issue. Retrouvant une vision normale, les deux jeunes gens se placèrent dos à dos, scrutant chacun une portion du cercle formé par leurs adversaires.

– Visiblement, je m’étais trompée, admit Madoka, en position de garde. Cette fille n’était pas seule.

– Je ne distingue aucune fille parmi eux, rétorqua Kenji.

– Leur cheffe nous envoie d’abord ses sbires, murmura Madoka, ses yeux plissés de détermination.

Regrettant d’avoir laissé leur moto à l’extérieur, Madoka et le frère d’Hikaru se préparèrent à l’affrontement. Kenji, expert en coups de pieds grâce à son jeu de jambes, se mit en position pour l’assaut. Madoka, quant à elle, extirpa quelques médiators des petits compartiments spéciaux de sa combinaison et les plaça délicatement entre ses doigts. Elle avait bien raison d’avoir enfilé l’uniforme souple de son alter-ego. Ce vêtement facilitait grandement le transport de ses armes de prédilection. Le toucher des médiators, légers mais redoutables, plongea Madoka dans des souvenirs d’autrefois qu’elle avait tenté d’oublier. Elle pensa également à Kyosuke, qui, en cet instant précis, incarnait sa force et sa détermination.

– Prête ? lui demanda Kenji, son regard fixé sur les motards.

– Prête ! répondit Madoka, un léger sourire audacieux se dessinant sur ses lèvres, comme en résonance avec ce passé lointain qui redevenait ici tangible.

Un premier motard quitta la formation et attaqua, fonçant droit sur eux, visant plus précisément Kenji. Celui-ci esquiva habilement et, d’un coup de pied rapide dans le dos du conducteur, désarçonna ce dernier qui s’effondra lourdement sur le sol cimenté. Madoka, elle, n’attendit pas d’être attaquée. Elle bondit en avant, lançant ses médiators avec une précision dévastatrice. Deux motards, prêts à fondre sur elle, tombèrent lourdement, incapables de contrer les petites lames se fichant douloureusement dans les fragiles cartilages de leurs mains, seuls moyens de tenir leur guidon. Les visages des assaillants, protégés par des casques assortis à leurs combinaisons, présentaient un obstacle épais que Madoka avait du mal pour le moment à percer avec ses médiators.

Le combat faisait rage dans la grande salle. Le cercle était rompu. Kenji semblait danser avec son jeu de jambes, chaque mouvement fluide et presque mortel. Madoka, telle une acrobate, utilisait son agilité pour éviter les attaques et riposter avec férocité. Les motos vrombissaient autour d’eux sans relâche, mais aucune ne parvenait à les toucher. Les motards tombaient comme des mouches devant la dextérité de Madoka et Kenji. Ce dernier désarçonna un assaillant d’un puissant coup de pied à la gorge, exploitant ce point sensible avec précision.

– Je te retrouve enfin, Ayukawa ! lança-t-il à celle qu’il pensait toujours être son amie. Tu es toujours aussi redoutable. Comme au bon vieux temps !

– Je ne veux pas revenir à ce jour ! rétorqua-t-elle mystérieusement, tandis qu’elle mettait à terre un motard récalcitrant, d’un genou vigoureux venant s’écraser contre un médiator déjà planté sur son casque. Celui-ci s’entrouvrit, révélant le visage d’un homme déjà inconscient avant même de toucher terre.

Les sbires de la mystérieuse jeune femme inconnue contre-attaquèrent avec encore plus de vigueur. Kenji fendait l’air, esquivant habilement les assauts, tandis que Madoka lançait ses médiators avec une précision dévastatrice. Revivant des habitudes qu’elle avait laissées derrière elle, et avantageusement vêtue de sa sombre tenue de combat sur mesure, Madoka virevoltait, ses mouvements aussi fluides que le vent, ses médiators comme des éclairs, perçant mains, jambes et bras, faisant tomber les motos une à une, leurs pilotes neutralisés par la force combinée de Madoka et Kenji. La jeune femme comprit alors comment la bande de Kenji et la Madoka de cet univers avaient réussi à dominer ce territoire.

Kenji s’empara d’une moto abandonnée et commença à se frayer un passage à travers un essaim de motards cherchant à lui barrer la route. En pleine lancée, il plaça ses deux pieds sur le siège, jambes repliées, et profitant de l’élan de la vitesse, plongea sur le groupe. Sa moto percuta la première, explosa en flammes, déclenchant une réaction en chaîne apocalyptique dans les rangs adverses. Kenji, comme mu par une force invisible, survola ses ennemis et retomba sur ses pieds, derrière toute la meute de machines qui s’effondrèrent dans un fracas de métal et d’os craquant sur le sol dur.

Kenji, tout fier de son petit exploit, se tourna alors vers Madoka, et lui cria subitement :

– Attention derrière toi !

La jeune femme, momentanément distraite par le vacarme des explosions des machines et les cris des hommes s’écrasant contre les murs en brique du hangar, se retourna juste à temps pour esquiver une dernière moto fonçant droit sur elle. Le conducteur, brandissant une grosse matraque hérissée de piques, avait failli égratigner son visage. Avec une colère maîtrisée, elle lança un médiator avec une précision implacable, touchant le moteur de l’engin, qui explosa, projetant violemment le pilote contre le mur dans un fracas assourdissant.

En quelques minutes, le sol du hangar était jonché de motos renversées ou détruites, et de pilotes inconscients ou gémissants. Essoufflés mais victorieux, Kenji et Madoka tournèrent la tête vers la porte menant à la pièce suivante, la grande porte coulissante attenante étant toujours verrouillée à dessein.

– Un autre groupe de motos nous attendrait-il de l’autre côté ? se demanda Kenji.

– Nous allons très vite le savoir, répondit Madoka en s’avançant déjà.

Il fallait délivrer Hikaru et Kyosuke sans plus attendre. Madoka passa la première le seuil de la porte. Le combat précédent l’avait privée de la moitié de ses médiators. Si un autre groupe tout aussi redoutable les attendait, elle serait à court de ressources pour affronter la mystérieuse jeune fille au final.

En pénétrant dans le nouveau hangar, le décor changea. La lumière inondait déjà l’espace entier. Cette section de l’entrepôt s’étendait sur bien deux cents mètres de longueur et cent cinquante de large, avec un plafond étonnamment haut. Des dizaines de monticules de sable industriel étaient éparpillés çà et là, obstruant leur vue d’ensemble, les empêchant de distinguer clairement le fond de ce grand dépôt industriel.

Marchant avec précaution sur le ciment uniquement, entre ces petites collines de sable, Madoka et Kenji progressèrent vers le fond de ce grand espace formant cet endroit choisi à dessein par l’adversaire.

Soudain, ils s’arrêtèrent net, leurs regards rivés sur une silhouette perchée au sommet d’un groupe de conteneurs maritimes aux multiples couleurs. Comment ces imposants coffrages avaient-ils pu se retrouver ici ? Une femme, vêtue d’une combinaison blanche et le visage dissimulé par un casque de même ton, à la visière opaque, se tenait là, laissant peut-être deviner un sourire énigmatique et des yeux déterminés.

– Madoka et Kenji ! déclara-t-elle d’une voix ferme. Vous en avez mis du temps !

Cette voix était la même que celle entendue au téléphone.

– Et pourtant, nous sommes en avance, répliqua Kenji avec un large sourire nerveux. Qui es-tu ?

Silencieuse, Madoka scruta la silhouette. En effet, qui pouvait-elle être, dissimulée derrière ce casque ? Selon le ton de la voix, elle était censée la connaître. Cette femme avait-elle vraiment un double appartenant à son monde ? Madoka n’avait jamais rencontré quelqu’un portant ce type de combinaison, mais cette voix lui était étrangement familière.

La femme au sommet du conteneur leva la main gauche et claqua des doigts. Derrière elle, la porte d’un autre conteneur, positionné à sa hauteur, s’ouvrit, révélant un motard casqué et imposant, tirant une chaîne au bout de laquelle une jeune femme fut contrainte de sortir. Les mains ligotées dans le dos et bâillonnée, elle était traînée de force par la chaîne autour de sa taille.

– Hikaru ! s’écria Kenji, accompagné de Madoka qui manifesta silencieusement sa surprise.

Kenji n’en croyait pas ses yeux. Sa petite sœur était là, vivante. Il ne l’avait pas vue depuis deux ans, et bien qu’elle ait quelque peu changé, sa joie était immense. Serrant alors les dents de colère, il cria à l’encontre de celle qui était responsable de cette situation :

– Canaille ! Relâche ma petite sœur immédiatement !

– Tu n’es pas en position de donner des ordres ! rétorqua la mystérieuse femme. N’oublie pas que tu dois respecter le marché que j’ai édicté.

Madoka regarda Hikaru. Elle ressemblait étonnamment à celle qu’elle connaissait. Était-il possible qu’elle soit vraiment celle qui avait disparu depuis deux ans, dans cet univers ?... Les yeux exorbités de Hikaru, lorsqu’elle croisa le regard de Madoka, étaient révélateurs. La jeune fille aux yeux azur semblait plus surprise de la voir, elle, que son propre frère aîné. Que signifiait cela ?...

– Où est Kasuga Kyosuke ? demanda Madoka avec conviction. Il fait partie de l’échange.

– Oh, lui ?... répondit nonchalamment la mystérieuse femme. Il dort paisiblement dans le conteneur. Il n’est rien pour moi. Je te le donne comme cadeau, car je sais que toi et Kenji avez des comptes à régler avec lui. La plus importante, ici, c’est Hikaru, la vraie monnaie d’échange.

– Pourquoi as-tu fait cela ? insista Madoka auprès de la mystérieuse jeune femme.

– Quoi donc ?...

– Avoir endormi Kasuga.

– Que t’importe ce type, Madoka.

– Tu es bien familière, toi qui te caches derrière ton casque. Pourquoi ne pas montrer ton visage ?

La jeune femme en combinaison blanche éclata de rire.

– Comment ?... Mais Madoka, tu me connais. Pourquoi fais-tu semblant ?

– Assez ! coupa Kenji, exaspéré par cette perte de temps. Finissons-en ! Que veux-tu ?

– L’emblème de ton groupe et son allégeance entière envers moi ! rugit-elle.

– Crois-tu ? Il me suffit maintenant de venir chercher Hikaru et de la délivrer. Ce n’est pas ton gros garde du corps qui va m’impressionner !

– Pauvre imbécile ! Je n’ai pas besoin de garde du corps. En quelques instants, je peux moi-même te neutraliser comme je l’ai fait envers Kasuga, lui qui n’a rien pu faire contre moi !

Madoka serra les dents. Kasuga… lui qui a le Pouvoir… Il aurait pu neutraliser facilement toute attaque contre lui par la simple pensée. Comment a-t-il pu se laisser avoir par cette fille ?...

Hikaru tenta désespérément de parler à travers son bâillon, mais les sons qui parvinrent aux oreilles de Madoka étaient incompréhensibles.

Madoka croisa à nouveau le regard de la fille au casque blanc et avertit :

– Hikaru doit absolument nous dire si elle va bien. Laisse-la parler !

Kenji souffla alors aux oreilles de Madoka :

– Ayukawa, à nous deux, nous pouvons facilement neutraliser cette fille et son toutou.

– Notre position n’est pas avantageuse, dit-elle. Cette fille ne m’inspire pas confiance. Méfiance.

– Elle semble te connaître, dit Kenji. Tu es certaine de ne pas la connaître ?

– Si elle garde son casque sur la tête, je ne suis sûre de rien.

La fille en question répondit :

– Ainsi, tu veux laisser parler Hiyama, Madoka ?

– Qu’as-tu à perdre ? répondit l’intéressée. C’est l’assurance qu’elle n’a pas été maltraitée.

– Très bien, si cela permet de conclure notre affaire. Hormis le fait que j’aie dû l’endormir et la ligoter comme tu le vois, je t’assure qu’elle n’a pas été victime de quelconques sévices.

– Qu’elle nous le confirme ! insista Kenji, le poing serré.

Un claquement de doigts de la mystérieuse jeune femme retentit, et son silencieux acolyte retira le bâillon de Hikaru.

Aussitôt, celle-ci hurla de toute sa voix, laissant éclater une émotion intense dont elle savait si bien faire preuve :

– Madoka ! C’est vraiment toi ?... Comment peux-tu être ici ?

Kenji trouva étrange que la première réaction de sa petite sœur, après deux ans d’absence, soit de se préoccuper davantage de Madoka que de lui. Madoka, elle aussi, fut surprise. La Hikaru de cet univers n’était pas censée lui parler ainsi.

– Hikaru ! C’est moi : Kenji ! Je suis venu te chercher ! Est-ce que tu vas bien ?

La jeune fille aux yeux azur fixa quelques instants ce jeune homme, qu’elle savait être le frère aîné de l’autre Hikaru, son double. Il était incroyable de le voir ici, en chair et en os, au pied de ce conteneur. Se sentant soudain moins seule dans cet univers étranger, elle cria encore à l’adresse de son amie :

– Madoka ! Madoka ! Attention, cette fille, c’est Sayuri Hirose !

Les yeux émeraude de Madoka s’écarquillèrent de surprise.

« Sayuri ?… »

Elle remarqua cependant que Hikaru continuait à s’adresser directement à elle, et non à son grand frère. Comment cela était-il possible ?

De son côté, Kenji était complètement troublé. Non seulement sa petite sœur semblait l’ignorer, mais elle cherchait constamment l’attention de Madoka, censée être ignorée en raison de leurs relations tendues. Que se passait-il ? Et qui était cette Sayuri Hirose que Hikaru et Madoka semblaient toutes deux connaître ? Il regarda Madoka et vit en effet que ses yeux étaient désormais sévères, fixés sur celle qui portait cette combinaison blanche. À son regard, Madoka connaissait vraiment cette Sayuri.

– Ayukawa… Que se passe-t-il ? lui demanda-t-il.

Lentement, Sayuri retira son casque, révélant sa chevelure dorée qui se déploya derrière sa tête et sur les côtés. Elle était identique à celle que Madoka et Hikaru connaissaient dans leur propre univers. Une immense beauté émanait d’elle, accompagnée d’une assurance renforcée par son regard azur perçant, lançant des messages invisibles à l’attention de Madoka. Cette dernière se demanda si elle ne venait pas du même univers qu’elle, mais c’était impossible. La Sayuri qu’elle connaissait était loin d’être la personne qui se tenait maintenant au sommet du grand conteneur.

Madoka se replongea alors dans les souvenirs presque oubliés de cette fille atypique qu’elle avait côtoyée de manière épisodique au lycée Koryo. Sayuri avait la réputation d’être une chasseuse de garçons, les rejetant sans pitié dès la moindre déclaration. Ce jeu cruel sans violence physique, consigné dans ses carnets de chasse, lui conférait un certain pouvoir ainsi qu’une renommée au sein de l’établissement scolaire. Jusqu’au jour où elle rencontra Kyosuke Kasuga, un jeune homme s’avérant être totalement insensible à son aura prétendument irrésistible. Kyosuke, en effet, ne pouvait se défaire des pensées profondément ancrées qu’il avait pour Madoka. Malgré de nombreuses tentatives, Sayuri échoua à le séduire. Mais la dernière action de Sayuri, l’été précédent, fut indirectement dévastatrice : elle avait initié une fausse rumeur sur Madoka, déclenchant une tempête qui brisa à jamais l’innocence et les sentiments ancrés dans les cœurs. Ainsi, Sayuri Hirose et ses doubles demeurant à travers tous les univers parallèles, détruisent tout ce qu’elles touchent. Même celle-ci, se tenant fièrement à sa place, distillait encore son venin sur Hikaru... Elle était si ressemblante en tout à la Hikaru qu’elle connaissait... Il fallait en avoir le cœur net…

– Hikaru, dans quelle ville as-tu habité après avoir quitté Tokyo ? lui demanda Madoka.

– Pourquoi lui poses-tu cette question, Ayukawa ? intervint Kenji, surpris.

– À Otaru, Madoka. À Otaru !... répondit la jeune fille.

À cette réponse, les yeux de Kenji s’écarquillèrent. Sa propre sœur avait-elle en fait fui discrètement la ville de Tokyo durant deux ans pour cet endroit si reculé du Japon ?

– Otaru ?... Tu... tu étais tout ce temps là-bas ? lui demanda son frère.

Mais Madoka entendit les mots suivants d’Hikaru, et fut pleinement convaincue :

– C’était il y a des semaines, quand tu es rentrée des États-Unis, se sentit-elle obligée de s’expliquer. Madoka, je suis désolée... Je…

La voix d’Hikaru toucha Madoka. Ce timbre doux et sensible qu’elle connaissait depuis tant d’année. Lorsque Hikaru partit brusquement pour s’installer à Otaru, elle n’avait appelé au téléphone que Kyosuke, pas elle. Maintenant, elle la retrouvait ici. C’était bien elle, « sa Hikaru », son amie de toujours, malgré les aléas de la vie qui malmène les destins, mais qui sait aussi rassembler les cœurs perdus.

Kenji et même Sayuri scrutaient Madoka avec une certaine incrédulité. Tous deux ignoraient tout d’un récent séjour aux Etats-Unis de sa part. Mais la jeune femme aux yeux émeraude se moquait de leur stupéfaction. Elle continuait à regarder tendrement Hikaru, qui, pour une raison inconnue, avait traversé tout le multivers pour se retrouver ici. Kyosuke, toujours endormi dans le container, devra s’expliquer, mais plus tard.

– Hikaru ! fit-elle de sourire et de joie. C’est bien toi !

– Madoka !... répondit son amie aux yeux azur. Merci d’être là !...

– Oui, je suis venue te chercher, toi... et Kasuga.

– Madoka, à ce propos de Kyosuke… ce n’est pas vraiment lui… hi hi…

– Mais vous allez arrêter, oui ? s’énerva Sayuri, se sentant complètement ignorée.

Madoka comprit enfin. Hikaru avait sans doute deviné qu’elle s’était retrouvée dans un univers parallèle. L’arrivée de Kyosuke dans cet univers avait sûrement provoqué un micmac infernal avec son alter-ego resté coincé dans sa bulle de téléportation. Madoka en déduisit donc que Kyosuke était retourné de force dans son univers d’origine avec la véritable sœur de Kenji, d’où cet échange interdimensionnel avec Hikaru, surprise de se retrouver soudainement à Tokyo, loin d’Otaru. Tout cela devenait de plus en plus compliqué.

Quoi qu’il en soit, Madoka et Hikaru restaient les deux seules personnes à avoir voyagé ici depuis un autre univers. La jeune femme à la chevelure bleu nuit songea à Manami, « sa Manami », qui devait être ailleurs, sans savoir si elle reviendrait un jour. La seule chance de rentrer pour elle et Hikaru résidait à présent dans le retour de Kyosuke dans cette dimension, ce qui ne devrait pas tarder, puisqu’il devait avoir compris les enjeux.

– Ayukawa, mais que se passe-t-il, enfin ? demanda Kenji. C’est quoi cette histoire de voyage récent aux USA ? Tu n’y es pas allée depuis des lustres, depuis ta courte visite chez tes parents là-bas, il y a un an et demi.

Madoka regarda Kenji avec désintérêt :

– Je te l’ai déjà dit : je ne suis pas ta Madoka Ayukawa.

– N... Nani ?!...

Une autre voix, sévère, s’éleva :

– Comment peux-tu dire cela, Madoka ? prononça Sayuri. Je t’observe depuis longtemps. Tu n’as jamais quitté la ville. Tu n’es jamais partie à l’étranger. Je ne sais pas ce qui se passe dans ta tête, mais tu ne tromperas personne ici.

– Madoka ! Fais attention à Hirose ! Elle possède des...

Hikaru ne put terminer sa phrase. Un claquement de doigts de Sayuri ordonna au geôlier de remettre son bâillon à cette fille trop bavarde. Désormais, impuissante, Hikaru ne pouvait que hurler dans une étoffe déformant le moindre son.

– Enfin le silence, fit Sayuri d’une voix rassurée. Cette fille a une voix qui m’agace au plus haut point. C’est insupportable. Mais revenons à nos affaires. Raison pour laquelle je vous ai conviés, Kenji et toi, Madoka.

– Ayukawa, on reparlera de cette histoire américaine quand tout ceci sera terminé, fit Kenji à son amie, partagé entre le trouble au sujet du nouveau visage que lui montrait continuellement Madoka et son désir de libérer sa petite sœur, dont les paroles renforçaient son incrédulité.

– Comme je l’ai déjà dit, vous me devez allégeance… vous deux et toute votre bande, rappela Sayuri. Contre la liberté de Hikaru.

D’un air menaçant, Kenji commença à s’avancer vers la base du conteneur maritime sur lequel se tenait Sayuri, en clamant :

– Je ne sais pas d’où tu sors, mais je vais te...

Il ne put achever sa phrase. Derrière lui, Madoka lui asséna un coup puissant à la nuque. Le jeune homme s’effondra, surprenant toutes les personnes présentes.

– Eh bien, Madoka, je vois que tu sais toujours autant profiter de la moindre occasion, fit Sayuri. Si je comprends bien, tu as pris la décision de te rebeller contre ton chef ?

– Il n’est rien pour moi, déclara Madoka. C’est entre toi et moi, Sayuri.

À ces mots, la jeune fille en combinaison immaculée esquissa un sourire empreint de tristesse. En cet instant, elle semblait retrouver une Madoka qu’elle avait toujours connue, comme si les souvenirs enfouis dans les replis de sa mémoire resurgissaient soudainement. Il y avait cette époque lointaine où elles s’étaient croisées dans une ville d’une province éloignée, bien avant Tokyo. Madoka n’avait pas toujours résidé dans la grande demeure qui l’abritait désormais. Sayuri et elle s’étaient liées d’amitié dans les couloirs d’une école de cette ville, où la douleur du harcèlement scolaire avait tissé les fils de leur complicité naissante.

Malgré leur faible différence d’âge, elles partageaient la même ambition farouche de défier l’injustice qui régnait en maître dans cet établissement sans repères. Unies dans leur révolte, elles se préparaient en secret, s’entraînant inlassablement avec une détermination sans faille à toutes les formes de combat concevables. Animées par leur amour commun pour la musique, elles avaient choisi ensemble le médiator comme arme de prédilection, discrète et aisément dissimulable sous leurs vêtements durant les cours. Ensemble, tout en grandissant, elles devinrent une force indomptable, un duo formant un sukeban redoutable, semant la terreur parmi les tyrans de l’école, puis du collège, en les défiant un à un.

Leurs exploits les menèrent au-delà des murs de l’établissement scolaire, vers les quartiers environnants gangrenés par la violence, surtout une fois la nuit tombée. Dans l’obscurité, elles patrouillaient, à l’insu de leurs parents respectifs, traquant les bandes armées, telles des chasseuses de primes modernes. Leur réputation grandissait, et leur amitié se consolidait dans le sillage de leurs adversaires vaincus. Pour Sayuri, c’était une époque dorée, où les rêves de vengeance contre la sottise humaine prenaient forme, tant dans les ruelles sombres que dans les batailles nocturnes.

Mais les rêves, hélas, ne durent jamais éternellement. Le cœur de Madoka fut épris d’un jeune garçon de son âge rencontré par hasard au voisinage de la future demeure que ses parents s’apprêtaient à acquérir dans la capitale. Il s’agissait de Kenji Hiyama, le futur leader du gang motorisé qu’ils allaient tous deux constituer ensemble quelques années plus tard. Lorsque Sayuri eut connaissance du départ imminent de Madoka pour une nouvelle vie et de sa rencontre avec Kenji, ce fut pour elle un coup terrible. Elle réalisa qu’elle perdait son amie de toujours, dans tous les sens du terme. Le départ effectif de Madoka vers la capitale, imposé par ses parents, fut un déchirement pour Sayuri, d’autant plus que son amie n’y montra pas elle-même de signes de résistance. Ainsi, l’amitié laissa place à un étrange sentiment de trahison dans l’esprit de Sayuri. Les chemins se séparèrent.

Devenue une louve solitaire dans les rues de sa ville natale, Sayuri sillonna à travers un chemin pavé de rancunes et de revanches, concrétisant ses sombres sentiments en se montrant encore plus impitoyable avec ses ennemis. Elle se tint sporadiquement au courant de la nouvelle vie de Madoka dans sa grande ville. Mais en dépit du temps écoulé, le désir de vengeance contre celle qui l’avait abandonnée jadis, ne l’avait jamais quittée. Sayuri nourrissait également une rage particulière contre Kenji Hiyama, qui avait fortement influencé Madoka dans sa décision de ne pas rester.

Des années après, elle finit par apprendre que Madoka et Kenji furent confrontés à la disparition mystérieuse de Hikaru Hiyama, la sœur cadette de Kenji. Hikaru avait complètement disparu de la circulation, suite à sa fuite avec un mystérieux jeune homme, dont elle sut plus tard qu’il s’agissait de Kyosuke Kasuga. Sa dernière localisation connue était le pont de Yokohama.

Récemment, Sayuri décida de s’émanciper définitivement du foyer familial, quittant à son tour sa ville natale, partant à la conquête de Tokyo avec sa propre bande de motards à ses côtés. Le temps de la louve solitaire était révolu pour elle. Et quel meilleur moyen de vengeance que de conquérir l’empire de Kenji et de Madoka, sa fidèle amie d’autrefois ? Elle fit récemment poster un garde en civil aux abords du pont de Yokohama, jusqu’à ce que celui-ci l’alerte ce soir sur la réapparition du couple Hiyama/Kasuga. L’occasion était trop belle pour Sayuri, qui voyait là un moyen de pression imparable sur Madoka et Kenji. Il fallait agir vite.

– Oui, c’est entre nous deux, désormais, Madoka, confirma Sayuri d’une voix empreinte de mélancolie.

Elle avança d’un pas, frôlant le bord du conteneur.

Les jolis traits de Sayuri se déformèrent alors dans une colère sans précédent :

– Par ta faute, Madoka !! Tu m’as abandonnée, trahie !!

– Sayuri...

Madoka savait que quelque chose d’inhabituel s’était produit pour Sayuri. Il était évident qu’elle et son double dans cet univers, se connaissaient depuis des années, et que la vie avait dû causer les catastrophes que Sayuri avait décidé de faire s’abattre sur le groupe de Kenji par vengeance. Au fond d’elle-même, Madoka se rassurait en pensant qu’elle avait eu raison de ne jamais rejoindre ou former un sukeban, source de trop nombreux drames internes à terme. La solitude, avec l’autonomie qu’elle permettait, était bien la seule solution pour évoluer dans « l’univers de la nuit ». Elle avait pu également mettre un terme à ses activités à temps, sans rien ne devoir à personne.

Il n’était pas question que Sayuri soit en mesure d’agir à sa guise. Il fallait mettre un terme à cette spirale destructrice, touchant à des êtres chers, même s’ils n’appartenaient pas à son univers. Elle devait à présent continuer de jouer son rôle, celle de cette Madoka dont elle avait pris la place en arrivant dans ce monde.

– Un duel, Sayuri. C’est ça que tu veux ?... C’est la seule issue à nos différends. Tu le sais aussi bien que moi. Choisis ton arme.

Sayuri acquiesça, résignée. La confrontation semblait inévitable.

– Un duel... oui. Contre tout ce que tu as. Tu mises tout ! déclara la jeune femme aux cheveux d’or, avec fermeté.

– J’accepte.

Hikaru, bâillonnée, tenta de se faire entendre. Madoka ignorait les réelles capacités de Sayuri. Hikaru savait que Madoka ne s’était plus entraînée depuis des années à combattre avec ses médiators ou à mains nus. Sayuri était d’une trempe bien supérieure. C’était une machine impitoyable capable de tous les coups possibles. Ce duel était une folie que Madoka n’aurait jamais dû initier. Il aurait fallu simplement accepter l’échange.

– Si tu perds, tu quittes la ville pour de bon, toi et tes complices, énonça Madoka. Pas de retour en quête de vengeance.

– J’accepte. Mais si je gagne, tu perds tout, Madoka. Toi et les Hiyama.

– J’accepte.

Les mots d’Hikaru, étouffés par le bâillon, résonnaient dans le silence oppressant qui suivit. Sayuri désigna deux motos peintes en blanc, parfaitement identiques, stationnées non loin des conteneurs.

– Choisis celle que tu veux, Madoka. Nous aurons une minute pour nous préparer. Pas de casque. Aucune sortie du hangar possible. Tous les coups sont permis. Pas de limite de temps. La première à terre a perdu. Voilà les règles. Tu les acceptes ?

Madoka savait qu’elle n’avait que peu d’expérience en moto, mais sa maîtrise des médiators compenserait peut-être.

– J’accepte, dit-elle.

Son regard croisa alors celui d’Hikaru, empli d’une crainte palpable. Madoka comprit : Sayuri était une adversaire redoutable, prête à tout pour parvenir à ses fins. Elle regarda Kenji, qui gisait toujours à même le sol, plongé dans l’inconscience. À son réveil, nul doute qu’il ne serait guère enclin à la jovialité.

D’un bond acrobatique, Sayuri, quitta les abords du conteneur pour se poser avec une élégance déconcertante sur le sol dur. Un saut prodigieux, haut de près de trois mètres, qui ne manqua pas d’impressionner Madoka, sachant pertinemment que la Sayuri Hirose qu’elle avait connue dans son propre univers n’aurait jamais osé s’essayer à de telles prouesses.

Dans un silence pesant, Sayuri se dirigea vers la moto que Madoka n’avait pas choisie, s’installant sur le siège de la machine. Madoka l’imita. Les moteurs vrombirent à l’unisson. Une puissance indéniable se dégageait de chaque machine. Madoka constata que sa moto était parfaitement opérationnelle. Sayuri avait tenu sa promesse.

Toujours muettes, les deux jeunes femmes se préparèrent, les moteurs de leur destrier métallique respectif grondant de plus en plus forts. Leurs regards se fixèrent, la tension montant d’un cran. Le rugissement des cylindrées emplit tout l’espace du hangar. Nul besoin de donner le signal. Les deux motos s’élancèrent de concert, au début droit devant elles, vrombissant à pleins poumons. Dans quelques instants, il n’y aurait plus de retour en arrière possible. Tétanisée, Hikaru s’affala sur ses genoux sur le toit du conteneur, emporté par le désespoir, témoin d’une confrontation pouvant tourner au désastre. À ses côtés, son garde muet, tenant la chaîne, scrutait les mouvements des motos qui venaient d’entrer en action.

Les deux machines se séparèrent au milieu du hangar. Arrivée au fond de la grande salle, Madoka posa un pied à terre, observant la scène, tout en laissant le moteur ronronner. Sayuri ralentit à son tour, prenant position à une distance respectable de son adversaire. Malgré l’espace qui les séparait, leurs regards se croisèrent, cherchant à déchiffrer les intentions de l’autre. Madoka devait se montrer imperturbable, ne laissant rien transparaître devant Sayuri. Une pensée pour Kyosuke traversa son esprit. Elle pria pour qu’il revienne au plus vite la chercher. Mais était-il déjà trop tard ?... Sayuri se délecta d’avance. Ce combat, c’était, au fond d’elle-même, ce qu’elle avait toujours voulu.

Le moment était venu. La minute de préparation était écoulée. Les moteurs rugirent avec une intensité redoublée. Les deux motos, se faisant face à distance, foncèrent l’une vers l’autre... À pleine vitesse !...

Un duel sans merci venait de débuter !...

 

 

 

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#52706 KOR en 48 semaines

Posté par CyberFred sur 08 juin 2024 - 13h24 dans Réflexions

FrozenOwl, très belle Réflexion/Témoignage qui pourrait figurer sur la page des témoignages de mon site. Penses-y.

Je suis d'accord sur le fait que Hikaru n'a jamais la moindre chance avec Kyosuke. L'ancrage des sentiments de Kyosuke envers Madoka s'est faite dès le départ. Je dirais presque aussi, si j'osais : première rencontrée, première aimée. Point barre. Les rencontres suivantes, le baiser accidentel avec Hikaru ne comptant pas au final dans les yeux de Kyosuke, lequel d'ailleurs, n'en fit pas allusion durant le reste de la série.

Belle conclusion à encadrer. Bravo pour tout le travail mené pour notre plus grande joie.




#52700 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 07 juin 2024 - 00h32 dans Goodies

Pour le moment, je suis satisfait de Japan Rabbit. Ils sont clairs dans ce qu'ils font et proposent. Ils communiquent bien via l'anglais. 




#52695 Anime - Episode 48 - Les dimensions temporelles

Posté par CyberFred sur 06 juin 2024 - 17h52 dans Réflexions

FrozenOwl, j'ai lu avec un grand plaisir ton compte rendu de l'épisode 48. Je dois avouer que tu t'es déchaîné pour cet épisode final; J'avoue que j'ai bien rigolé des commentaires délires que tu t'es permis de placer en dessous des images. Images très nombreuses cette fois-ci. Surtout, fais attention aux cookies de ton PC, ok ? Comme toujours, tu as discerné les incohérences de cet épisode. Mais l'émotion finale nous gagne et nous fait tout oublier. Bravo pour ce bel article qui mérite de figurer dans le top super marrant délire des articles que tu as réalisé. Tente de faire pareil avec l'épisode 49 :D Et merci pour tout ce que tu as fait pour ce parcours des 48 épisodes. Je suis prêt à parier que tu va t'attaquer aux deux films, maintenant ? Diantre ! Ha ha ! :D En tous cas, on va en reparler lors de l'IRL du 22.




#52693 Anime - Episode 48 - Les dimensions temporelles

Posté par CyberFred sur 06 juin 2024 - 17h35 dans Réflexions

 

Scène poste-crédit 2 (à ne lire qu'après les deux posts précédents)

 

klr7.png


"- Zut, trop tard."

 

 

FrozenOwl, tu voulais qu'elle tombe ? :D 




#52689 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 06 juin 2024 - 11h42 dans Goodies

Merci tcv et Youvi pour votre retour. Donc, je suis rassuré. 




#52683 Goodies japonais des expositions KOR

Posté par CyberFred sur 06 juin 2024 - 07h54 dans Goodies

J'ai une question pour ceux qui ont passé plusieurs commandes regroupés en un seul colis chez JapanRabbit : lorsque vous avez reçu votre colis avec les objets regroupés à l'intérieur, est-ce que Japan Rabbit a laissé chaque commande à l'intérieur, dans chaque paquet  postal qu'il a reçu de son côté ? En effet, je me demande si Japan Rabbit inclut dans son colis final envoyé toutes les enveloppes ou cartons postaux, celés, sans avoir vérifié chacun d'eux au préalable. Ce qui peut augmenter le poids final du colis. Merci à vous.





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